tribunes

Lutter contre la discrimination professionnelle liée à l’âge

le 29 juillet 2020

Dans une société où tout va toujours plus vite, où la recherche de performance est constante, où l’innovation est au cœur du développement économique, les entreprises ont tendance à privilégier des candidats jeunes au détriment de profils plus âgés. Or, sur un marché de l’emploi déjà saturé, les seniors peinent à trouver leur place. Considérés à tort comme trop coûteux, peu flexibles ou difficiles à manager, les seniors sont victimes de stéréotypes. En témoignent les chiffres du chômage des plus de 50 ans largement supérieurs à la moyenne. Quels sont les freins à l‘emploi des seniors ? Quels sont les leviers pour remédier à la discrimination liée à l’âge ?

 

Discrimination liée à l’âge, déconstruire les idées reçues

Qu’ils soient en recherche d’emploi ou en poste, les seniors se trouvent confrontés à de multiples freins professionnels. Refus d’embauche ou de promotion, « mise au placard », incitation au départ… Les plus de 50 ans sont régulièrement victimes de discriminations liées à l’âge. Pourtant, au même titre que le sexisme, le racisme ou l’homophobie, l’âgisme est interdit par la loi et passible de 3 ans de prison et de 45 000 € d’amende.

 

Les victimes ont la possibilité de saisir les prud’hommes, l’inspection du travail ou le défenseur des droits. Or malgré cet état de fait, et même si l’âge demeure le premier motif de discrimination professionnelle, très peu d’actifs usent de ces recours. Et les chiffres sont éloquents, selon le rapport « Les seniors, l’emploi et la retraite de 2018 », le taux d’emploi des 60-64 ans est de 30 %. Une proportion très basse au regard des politiques d’allongement de durée de cotisation pour partir en retraite à taux plein.

 

Pourtant, avoir recours à un actif d’âge mûr présente de nombreux avantages pour une entreprise, loin des idées reçues sur les seniors. L’expérience est sans aucun doute, le premier atout des actifs âgés. Forts d’une carrière déjà conséquente, les seniors possèdent une connaissance accrue de leur domaine d’activité et du monde du travail, ainsi que des savoir-faire leur permettant d’être rapidement opérationnels sur le terrain. On note par ailleurs que les plus de 50 ans sont aujourd’hui parfaitement acculturés à l’informatique et ont passé la majeure partie de leur vie professionnelle à utiliser ces outils.

 

Leur maturité et leur connaissance du monde de l’entreprise constituent également des avantages de poids pour s’adapter aisément à un nouveau secteur. Autonomes et ponctuels, les seniors nécessitent généralement moins d’encadrement et exercent une influence souvent bénéfique sur les profils plus jeunes. Particulièrement motivés, face à un marché du travail qui les malmène, et dégagés des contraintes familiales (plus d’enfant en charge), ils offrent à leur société, à la fois, stabilité et flexibilité. Outre ces atouts, propres au profil de chaque candidat, de nombreux dispositifs soutiennent les entreprises qui font le choix d’embaucher un profil plus âgé.

 

Des leviers pour soutenir l’emploi des plus de 50 ans

Les pouvoirs publics sont mobilisés pour soutenir la formation et l’embauche des profils éloignés de l’emploi. Depuis le 1er janvier, un système de bonus-malus pénalise par exemple le recours massif aux contrats de courte durée dans plusieurs secteurs d’activité en modulant le taux de contribution à l’assurance chômage. L’objectif est de lutter contre la précarité en soutenant l’emploi pérenne.

 

Face aux chiffres du chômage des seniors, plusieurs dispositifs spécifiques sont proposés aux entreprises :

  • Le CDD senior permet d’embaucher un demandeur d’emploi de plus de 57 ans sur 36 mois contre 18 mois pour un CDD classique.
  • Les entreprises peuvent prétendre à une aide spécifique de 2000 € pour l’embauche d’un salarié de plus de 45 ans en contrat de professionnalisation, quel que soit le type d’embauche (CDD ou CDI).
  • Visant les publics éloignés de l’emploi (seniors, handicapés, chômeurs de longue durée…), le Contrat Unique d’Embauche (CUI) permet de bénéficier d’une aide financière notamment pour l’embauche de personnes de plus de 50 ans. Réservé au secteur non marchand, ce type de contrat peut être prolongé pour une durée maximale de 60 mois.
  • Offrant plus de souplesse qu’un intérim classique, le CDI aux fins d’employabilité permet de confier une mission allant jusqu’à 5 ans à des actifs rencontrant des difficultés d’accès à l’emploi, et en particulier aux personnes âgées de plus de 50 ans. La gestion administrative est assurée par une société de placement de personnel.
  • Pour toute embauche d’un demandeur d’emploi de plus de 55 ans en CDD de plus de 6 mois ou en CDI, les entreprises peuvent prétendre à une aide à l’embauche des seniors équivalente à 14 % du salaire brut pendant 1 an.

 

Face à un contexte démographique où la part de seniors augmente constamment dans la population, il est important que les entreprises s’engagent contre les discriminations liées à l’âge en tenant compte des atouts et avantages que présente l’embauche d’un senior. Toutefois, face à la pandémie de Covid-19, lourde de conséquences sur le marché de l’emploi, l’exécutif a défini comme prioritaire la relance de l’emploi des jeunes, plus sensible en période de crise.

 

Le 14 juillet dernier, Emmanuel Macron annonçait ainsi plusieurs mesures pour soutenir les jeunes diplômés : l’exonération de charges pour l’embauche d’un jeune peu qualifié, l’ouverture de 200 000 places dans des formations qualifiantes, le soutien de l’apprentissage, de l’alternance et des contrats professionnalisant ainsi que la création de 100 000 nouvelles missions en service civique. Gageons que ces mesures porteront leurs fruits et permettront de dynamiser l’économie et l’emploi des jeunes comme des seniors.

 



Hélène MARTIN2021-03-05 20:43:05
Très bon article. Je suis discriminée depuis mes 39 ans déjà à des postes d'assistantes de direction. Mon âge a été évoqué très clairement en interim : "Nous cherchons des profils plus juniors." Pour les femmes et dans les carrières du tertiaires, ce critère à l'air prépondérant. Je précise que je ne parais pas mon âge canonique maintenant de 47 ans. J'envois donc mon CV avec photo. Lorsque je donne mon âge en entretien, je suis recalée. J'envisage une reconversion mais vers quoi ? J'ai pourtant prouvé mon dynamisme en ayant obtenu une licence RH à 38 ans. Mais rien n'y fait !! Alors que faire ?? Se retrouver au RSA parcequ'on est trop vieux à 40. C'est inadmissible.
Frédéric2020-08-25 08:06:23
Merci pour votre article, bien rédigé et nécessaire. Oui, la discrimination des séniors en poste tape dur, elle aussi, et malgré d'excellents résultats qui seront alors minimisés, imputés à d'autres facteurs, bref : portés à votre passif ("c'est agaçant, ils n'ont pas compris qu'ils sont censés être dépassés ?") et non à votre actif.
JOCELYNE MOUTON2020-07-31 16:33:57
Généraliser est source d'erreurs et classer par tranche d'age en évinçant les seniors de la sphère professionnelle est une ERREUR! C'est la mixité des profils en intégrant la constante del'intergénérationnel qui peut éviter que l'archipel français ne grandisse, a l'origine des tensions sociales grandissantes.

Vous voulez réagir ? Laissez-votre commentaire en remplissant le formulaire ci-dessous

Sur les mêmes sujets

revues du web RH

Revue du web #435 : RSE, QVT et droit du travail

La RSE et la QVT restent au cœur des réflexions RH. Côté droit du travail, le décret réformant l’abandon de poste sera bientôt publié.

Visuel de la Parole d'expert d'Olivier Graffin de l'AFNOR sur la RSE dans le Cahier de tendances RH
Cahier de tendances 2023 Olivier Graffin

RSE : « Les DRH sont en première ligne de ces enjeux » (Olivier Graffin, AFNOR)

Dépassant le seul axe environnemental, la RSE concerne « nécessairement » les DRH. Quelle est leur approche de ces enjeux, et leur rôle en la matière ? Comment l’AFNOR les accompagne-t-elle...

Visuel du Portrait de DRH de Delphine Chevalet-Chapeaud, Verisure, sur la thématique de la RSE
Cahier de tendances 2023

Portrait de Delphine Chevalet-Chapeaud, Verisure : RSE, pour une DRH responsable

Pour Delphine Chevalet-Chapeaud, DRH de Verisure, la stratégie RSE doit partir de l’éthique. Et correspondre à un projet d’entreprise, et non de direction. Un nouveau « portrait de...

L’actu RH vous intéresse

Recevez chaque vendredi La News© du Média 100% RH