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Le rôle du manager change : l’entreprise doit l’aider à se former de lui-même !

le 22 avril 2022
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Face à un monde du travail en mutation, le management, socle de la transformation de l’entreprise, évolue. Ce qui nécessite pour les chefs d’équipe de développer constamment de nouvelles compétences. Leur défi sera d’aller plus loin que les formations de base du « tronc commun », pour développer leurs propres plans de progression. Dans cette optique, les entreprises, et en premier lieu les DRH, devront poser les bases d’un environnement qui facilitera notamment l’auto-diagnostic et la formation de pair à pair.

Plusieurs paramètres poussent aujourd’hui à repenser le management. La crise du Covid-19, tout d’abord, a chamboulé le monde du travail. Le manager se doit désormais d’intégrer, en tout ou partie, la relation distancielle avec ses équipes : hybride, il est davantage basé sur la confiance et les objectifs. La pandémie a aussi renforcé l’importance chez les salariés du sens au travail et de l’équilibre vie personnelle – vie professionnelle. Ils se posent aujourd’hui de nombreuses questions quant à la raison d’être de leurs missions et de leurs fonctions dans l’entreprise. Dans ce contexte, le management évolue, jusqu’à devenir un management par le sens, par la responsabilisation, par la valorisation. Il nécessite notamment, et la distance renforce cet impératif, d’être capable de faire en sorte que les collaborateurs voient un sens à la fois individuel et collectif dans leur travail. Le sens insufflé par le chef d’équipe à ses salariés doit être davantage dicté par l’intérêt collectif que par la simple satisfaction personnelle de chacun. 

Au-delà de la crise, la digitalisation des entreprises change aussi la donne. Les organisations évoluent depuis plusieurs années déjà dans un monde volatile, incertain, complexe et ambigu (VUCA) (1). Dans ce contexte changeant et potentiellement stressant, le management doit faire en sorte de permettre aux collaborateurs de retrouver une forme de plaisir, de confiance, et même d’attirance par le risque. Il doit les accompagner afin qu’ils puissent retrouver aussi un esprit créatif face à des événements incertains. Cette complexité conduit aussi les managers à adopter une posture d’agilité dans leur relation aux autres, dans leur capacité à capter les événements et à y identifier des opportunités, et dans leur façon de conduire leurs actions. 

Un management agile et responsable…

Plus le contexte est incertain, plus le chef d’équipe se doit de suivre une logique d’agilité, de proactivité et de « test and learn » (2). Le rôle du « manager agile » n’est dès lors plus le même : il agit comme un facilitateur, sa mission étant principalement de motiver ses collaborateurs, à qui il distribue plus d’autonomie. Il les accompagne, lève leurs contraintes, les aide à prendre des initiatives et à tester de nouvelles idées. Les collaborateurs sont davantage acteurs, dans un nouvel univers axé autour des projets et d’une forme de prototypage permanent. 

Par ailleurs, les managers ont aussi pour mission d’accompagner le changement, quand leur entreprise se transforme ; ce qui implique également pour eux de développer de nouvelles compétences liées à l’agilité et à un leadership inspirant. Dans un contexte où les cycles de vie sont très courts et les évolutions rapides, le manager incarne aussi, aujourd’hui, un rôle important de business partner. Il se doit de mieux comprendre, grâce à de nouvelles habiletés (techniques et comportementales), les besoins de marché, afin d’engager la conception et le développement continu de produits et services adaptés. Cette vision business porte aussi un défi environnemental et sociétal. Le manager doit agir comme un phare auprès de ses équipes pour les guider dans ce monde incertain.

L’importance de plus en plus croissante de la RSE tend ainsi à développer la notion de « management responsable ». La responsabilité du manager est, d’abord, davantage portée sur le social. Il se doit de se soucier, toujours plus, du bien-être de ses collaborateurs ; par la confiance, la reconnaissance, l’écoute. Il fait attention à ménager leur charge de travail et surveille les signes potentiels d’un déséquilibre entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle. Mais sa responsabilité est aussi sociétale et environnementale : il doit, de plus en plus, faire en sorte que ses équipes participent à des projets qui ont du sens et un impact positif sur la société extérieure. Notamment en matière d’inclusion. Il doit aussi intégrer la réduction des temps de trajet (et du bilan carbone associé) de ses salariés, dans la façon dont il organise leur travail.

… Qui nécessite de se former différemment

Face à ce nouveau paradigme, manager devient un métier. Il n’est plus possible de devenir chef d’équipe ou cadre dirigeant sans y avoir été formé au préalable : toutes les postures précédemment décrites nécessitent d’acquérir de nouvelles compétences, pour lesquelles il est important de se placer dans une logique de progression continue dans sa fonction. Les managers (actuels ou futurs) doivent avoir conscience de ce qu’implique leur fonction. Ils doivent être capables, dans ce sens, d’évaluer leurs compétences et les axes de progrès à suivre, afin de construire un plan de progression. Ce plan est d’abord individuel : il nécessite un engagement fort de l’individu à prendre conscience de ses forces, mais aussi de ses faiblesses et de ce qui peut être développé. 

Dans ce cadre, les formes d’apprentissage évoluent. Les managers et les dirigeants peuvent d’abord parfaire leurs compétences en intégrant régulièrement des sessions de formation (courtes, longues, présentielles ou distancielles). Mais cette étape, bien que nécessaire, est insuffisante. La volonté d’évoluer en permanence et en continu nécessite de pouvoir acter chaque jour ses succès et de jauger ses axes de progression. Pour cela, il est possible de faire appel à un coach, mais aussi à ses pairs ; sous la forme d’un « mentorat » ou « parrainage » interne (3), mais aussi d’ateliers de partage et de co-développement, de communautés de pratiques et de « cercles ». (4) Un plan de progression continue et individuelle passe aussi par la volonté de se documenter en ligne, de lire des ouvrages, ou encore de participer à des « learning expeditions » afin de s’inspirer de ce qui se pratique dans d’autres entreprises.

Les DRH, socles de l’auto-apprentissage des managers

Les formes d’apprentissage sont donc multiples, et pour engager une véritable progression continue, il faut les varier au maximum. Afin d’aider les managers à tendre vers cette logique, les DRH peuvent  :

  • Leur demander de réaliser un bilan individuel de compétences (hard skills, soft skills) ;
  • Leur permettre de partager leurs besoins ;
  • Leur proposer une offre de formation modulaire et à la carte ;
  • Leur donner la possibilité de s’inscrire dans un réseau ou une communauté de pairs, et prendre en charge cette adhésion ;
  • Mettre en place, dans l’entreprise, des ateliers de pratiques et de partage ;
  • Développer un système de mentorat interne.

Au travers de toutes ces actions, l’idée est finalement de favoriser l’auto-bilan, et de poser les bases d’une organisation auto-apprenante ; axée sur la formation de pair à pair et la capacité de chacun à devenir acteur de sa propre progression. Alors que les entreprises souhaitent devenir plus agiles, plus créatives et plus responsables, force est de constater que cette transformation repose sur les managers. Et qu’il est capital de les accompagner pour leur permettre de développer, individuellement, leurs compétences. 

(1) Acronyme né dans les années 1990 et issu du vocabulaire militaire américain. Le concept avait pour but la sécurité du territoire, en exposant le moins possible les populations. Le monde des affaires l’utilise désormais pour définir le type de marché dans lequel nous évoluons. VUCA : « volatility, uncertainty, complexity and ambiguity ».

(2) La méthode de gestion de projet dite de ‘Test And Learn’ consiste à mettre en place des projets sous-jacents au projet global, et de mesurer rapidement leurs efficacités afin d’évaluer la pertinence du projet. Chaque feed-back, établi à un rythme régulier et relativement court, permet de corriger les points faibles, et de déterminer des actions à mener pour optimiser le projet. Les maîtres mots du « test and learn » sont ainsi : expérimenter, analyser, apprendre pour éventuellement corriger, puis valoriser les résultats. 

(3) À titre d’exemple, Air France a mis en place le projet « gainer », qui permet aux pilotes de ligne en proie aux doutes, de se faire parrainer par d’autres pilotes, déconnectés de leur équipe ou de leur hiérarchie directe.

(4) Il existe des ateliers entre managers, durant lesquels chacun partage ses problématiques, ses retours d’expérience, ses conseils et ses bonnes pratiques. D’autres « cercles », comme EVH (entreprises vivantes et humaines) pour les dirigeants, organisent plusieurs fois par an des séminaires entre pairs.

Crédit photo : Shutterstock / fizkes



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