Emploi des seniors : un enjeu clé pour notre avenir commun
À l’heure où l’inclusion fait figure de credo, souvent affiché plus rarement incarné, la question de l’emploi des seniors est loin d’être résolue. Alors que la partie supérieure de la pyramide des âges s’étoffe de plus en plus, la discrimination par l’âge n’est « soutenable » ni sur le plan économique ni sur le plan social. Comment briser les clichés et œuvrer en faveur de l’emploi de professionnels disposant de compétences, d’aptitudes et de richesses humaines, quel que soit leur âge ? C’est ce que propose l’Observatoire des Métiers du Futur dans l’infographie que vous allez découvrir.
Sommaire
Junior aujourd’hui, senior demain : pourquoi l’emploi des seniors nous concerne tous
Quel que soit notre âge actuel, nous aurons tous un jour 45, 50, 55 ans ! Pourquoi ces seuils d’âge multiples ? Parce qu’il n’existe pas de définition universelle de ce qu’est un professionnel senior. D’ailleurs, dans la population générale, ce terme désigne les retraités. Un point d’étymologie : en latin, senior signifie « vieux, âgé, déclinant ». Mais l’usage qui en est fait dans le monde de l’entreprise vient de l’anglais, senior désignant alors « le plus ancien », le plus expérimenté. La connotation péjorative a donc à voir avec une confusion sémantique. Et le flou ainsi entretenu s’avère délétère.
Pour sa part, l’étude de l’Observatoire des Métiers du Futur (dont est issue l’infographie éponyme), fixe le seuil d’entrée à 50 ans (catégorie des 50-64 ans). Et force est de constater que la proportion de ces travailleurs croît nettement – d’un peu plus de 15 % de la population active en 1995 à 30 % en 2018. L’allongement de la durée de vie « tout court », et de la durée de la vie active en particulier avec des départs à la retraite plus tardifs, explique ce phénomène. Dans cette optique, faire l’impasse sur l’emploi des seniors aurait tout d’un non-sens.
Les avantages et les challenges de l’emploi des seniors
Comme l’indique la professeure Stefanie K. Johnson (dont les propos sont ici repris), « combiner la richesse des jeunes générations à celle des travailleurs plus seniors favorise [la] diversité de pensée… qui se traduit par de meilleures prises de décision, de résolution de problèmes et davantage d’innovation. »
L’emploi des seniors est source de bénéfices. Parmi les principaux, relevons :
- L’expérience – pour 65 % des répondants ;
- La fiabilité – pour 12 % d’entre eux ;
- L’efficacité et le réseau – à 9 % ;
- Une motivation supérieure – pour 27 % des personnes interrogées.
Sachant que 61 % des répondants estiment que la motivation des professionnels seniors est équivalente à celle des autres populations de l’entreprise.
Quant aux challenges, ils portent :
- Sur le niveau de rémunération – pour 44 % des répondants ;
- Sur l’adéquation culturelle (19 %) – sans que l’on sache s’il s’agit de l’adéquation avec les autres populations de l’entreprise, ou avec la culture de l’organisation ;
- Sur le manque de compétences numériques(18 %) – on y reviendra ;
- Sur une « problématique » soft skills (13 %).
Ce dernier point a de quoi surprendre alors même que les soft skills se développent notamment au fil de nos expériences, personnelles et professionnelles. Le problème soulevé ici pourrait concerner le travail collaboratif, dont l’essor date d’une dizaine d’années seulement. Notons dans ce cas que le travail collaboratif est sous-tendu par une palette de soft skills que les seniors ont probablement déjà activées, au moins en partie. Leur réticence potentielle à adopter un nouveau mode d’organisation tiendrait plutôt à leurs habitudes de travail.
Focus sur les seniors et la formation
Une idée reçue perdure quant à la capacité d’apprentissage des seniors, supposée moindre. Premier constat : un « faible investissement de l’entreprise » à leur égard est signalé par 36 % des répondants. Comparativement, le « manque de volonté des seniors » n’est cité qu’à hauteur de 8 %.
Par ailleurs, nos connaissances du fonctionnement du cerveau apprenant ont beaucoup évolué. On parle ici de neurogénèse : pour reprendre les termes du Docteur en neurosciences Isabelle Simonetto, « nous avons au niveau de l’hippocampe une « nurserie » qui fabrique des néo-neurones à tout âge. La croyance selon laquelle il serait trop tard pour apprendre n’a aucun fondement neurobiologique ».
L’évolution des dispositifs et modalités de formation offre d’ailleurs des opportunités aux entreprises, avec des formats courts permettant la mise en œuvre immédiate en contexte professionnel. Dans cette optique, les directions des ressources humaines –et les directions générales – ont un rôle considérable à jouer, pour ne pas « oublier » certaines populations quand il s’agit de définir les priorités de formation. Ceci nonobstant les « contenus ou modalités » signalés par les répondants comme « inadéquats », la formation distancielle / digitale étant probablement visée.
Ne s’agit-il pas, une nouvelle fois, de préjugés visant les seniors ? Si le manque de compétences numériques est encore, sans doute, effectif dans cette tranche d’âge, ce ne sera plus le cas avec les actuels quarantenaires ! Sachant par ailleurs que les « grands experts » d’Excel – par exemple – ont en général plus de 50 ans ! La maîtrise des subtilités de ce logiciel-là rend peu plausibles les difficultés d’appropriation d’outils numériques très intuitifs, moyennant un accompagnement adapté.
Une question pour conclure : peut-on réellement soutenir que l’âge des personnes, les définit ? Ce serait nier le caractère profondément UNIQUE de chacun être humain ainsi que les ressources spécifiques dont il dispose et qui ne dépendent, en aucun cas, de son âge.