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Prix du DRH numérique : l’innovation en digital RH se porte bien en 2018

le 12 décembre 2018
Prix ANDRH du DRH Numérique

Quoi de neuf sur le front de la digitalisation des RH ? Le 22 novembre dernier, à Station F, l’ANDRH organisait la 5e édition de son Prix du DRH Numérique. Objectif : promouvoir les acteurs RH qui innovent dans leur organisation, valoriser les bonnes pratiques, identifier les tendances… Tout en montrant par l’exemple la façon dont la fonction RH se transforme en lien avec le numérique. 4 lauréats ont été distingués : nous les avons interviewé pour vous. 4 portraits, 4 exemples de digital RH en 2018, en ordre alphabétique pour ne pas faire de jaloux !

 

Christophe Barré, DRH de l’OPPBTP : « les collaborateurs nous poussent dans la transformation »

Christophe Barré a reçu le prix « Transformation numérique » pour son action conduite au sein de l’OPPBTP, l’organe « santé et prévention » des professions du bâtiment et des travaux publics. Le prix, en l’occurrence, ne récompense pas  une action précise, mais une démarche : celle du plan stratégique « Horizon 2020 », mis en place pour la période 2016-2020 – après un premier plan 2010-2015. Un plan qui articule intelligemment digital et transformation de la fonction RH.

« Le plan Horizons 2020 était pour nous l’occasion de nous recentrer sur notre mission », explique Christophe Barré, « autour des trois thèmes majeurs de notre activité : mobiliser les entreprises autour de la prévention ; faciliter le partage d’informations et de pratiques ; accompagner les entreprises sur ces thématiques ». Pour améliorer la performance de l’organisation sur ces trois axes, deux types de moyens sont ciblés : le digital et la formation. Le plan stratégique se traduit d’abord par des solutions nouvelles apportées aux clients, les entreprises du BTP. Sa finalité n’est donc pas spécifiquement RH, mais il intègre la fonction RH en soutien à son déploiement.

D’abord en matière de formation, avec dès le début « un énorme travail de développement des compétences, notamment digitales ». Ensuite en communication interne, avec la création d’outils digitaux, le recours à l’intranet, aux réseaux sociaux internes, à la visioconférence… Mais aussi en matière de management : l’intelligence des collaborateurs est mobilisée, par le biais du « réseau des éclaireurs, composé de 20 collaborateurs chargés de rester en veille sur la façon dont le digital transforme les métiers du BTP. »

D’autres dimensions du plan sont « plus directement liées aux conditions de travail des collaborateurs » : un accord de télétravail a été signé avec les 4 organisations syndicales présentes dans l’entreprise. Une quarantaine de collaborateurs (sur 325) le pratiquent déjà.

Surtout, « du côté de la fonction RH, le plan stratégique nous a beaucoup impactés sans que nous nous en rendions compte. » Le changement a pris diverses formes. On peut mentionner le vote électronique dans les élections professionnelles, la dématérialisation des bulletins de paie (92% des salariés ont adhéré), l’utilisation du e-learning, mais aussi l’installation d’un SIRH qui « nous a permis de digitaliser le recrutement, la gestion du personnel, la conception et le déploiement du plan de formation… »

Un travail a également été conduit sur la marque employeur. La page LinkedIn de l’OPPBTP est passée en à peine un an de 600 à 8300 abonnés, grâce à la participation des collaborateurs, « qui ont vraiment joué le jeu ».

Qu’est-ce qui a permis ce succès ? « Nous avons fait de la conduite du changement en respectant les bases de l’exercice : avoir une vision claire de là où on souhaite aller ; prendre le temps nécessaire ; accompagner les gens dans la transition ; accepter que les changements aillent parfois un peu moins vite que ce que l’on avait anticipé. […] Aujourd’hui », conclut le DRH, « ce sont les collaborateurs qui nous poussent à aller plus vite, par exemple en nous intéressant à la robotisation… »

 

Samuel Dewitte, DRH de Hopps Group : Job Hopps, ou la « Social digital attitude »

Le prix du DRH numérique a été décerné à Samuel Dewitte, pour la mise en place d’une application originale et innovante : Job Hopps. Le principe : permettre à des salariés en CDI à temps partiel de trouver à proximité un autre CDI complémentaire. Avec, pour l’entreprise, le bénéfice d’un turnover en baisse.

Comment est née l’idée de Job Hopps ? « Au départ de l’initiative, il y avait notre problème de turnover. Nous avions jusqu’à un millier de salariés qui partaient par mois », explique Samuel Dewitte. Le groupe Hopps emploie des salariés à temps partiel pour distribuer des documents publicitaires. « Pour mieux comprendre ce qui se passait, je suis allé faire moi-même des distributions. » Il mesure l’ampleur du problème : les salariés qui travaillent 12 ou 15 heures cherchent pour la plupart un emploi complémentaire qui soit situé à proximité. « Un salarié de Onet qui faisait le ménage chez nous m’a demandé un jour s’il ne pouvait pas faire des distributions dans la même zone. Je me suis dit alors que j’allais faire ce qu’aucun DRH n’avait fait jusque là : m’occuper du temps non travaillé des collaborateurs ».

Samuel Dewitte propose alors son idée à la direction du groupe, qui refuse. « J’ai décidé de le faire quand même. Pour moi, une innovation, c’est une désobéissance qui a réussi ! Je suis donc allé voir Pôle Emploi, puis d’autres entreprises comme O2 ou Onet pour voir si nous ne pouvions pas créer une sorte de groupement d’employeurs allégé. L’idée est de dire aux candidats au recrutement, je te propose un travail et je vais t’aider à en trouver un autre qui soit complémentaire et à proximité ».  L’enjeu étant à la fois de fidéliser les salariés et de répondre à leur besoin, qui n’est pas seulement d’avoir un revenu suffisant, mais aussi d’avoir des temps de transport raisonnables. « On retrouve bien la problématique de coûts de transports exprimée par les Gilets Jaunes », souligne à juste titre le DRH. Mais aussi celle du réseau : « je ne connais personne », se plaignait un jeune à Samuel Dewitte.

L’appli Job Hopps répond à ces différentes questions. Elle permet de visualiser les offres de travail à temps partiel situées autour de vous, par géolocalisation. « Vous cliquez, vous voyez l’offre d’emploi. Vous cliquez une seconde fois, vous avez postulé ». C’est ce que le DRH de Hopps Group appelle la « social digital attitude ». Le social, c’est de voir au-delà du seul temps de travail de ses employés. « Le digital, c’est l’accélérateur. Et l’attitude, c’est une appli qui tende la main ». L’appli compte également un espace recruteur, gratuit pour les entreprises.

Aujourd’hui, 6 mois après le lancement de Job Hopps, on compte déjà plus de 15 000 candidatures et 7 000 offres. « On devrait bientôt passer les 10 000 ». Et les premiers résultats en matière de turnover se font sentir : « nous sommes passés cette année à 850 départs, sous la barre des 1000. Je suis confiant du résultat à moyen terme ».

 

Lauréats du prix du DRH numérique - ANDRH

De gauche à droite : Marie GODARD, DGA Innovation, Ressources humaines et Usages numériques de Paris Habitat, Samuel DEWITTE, DRH HOPPS Group, Patrick PLEIN, Directeur digital working et Academy de VINCI, Christophe BARRE, DRH OPP BTP – Crédit photo : Maria Cabrelli.

 

Marie Godard, DGA de Paris Habitat : « le projet a fait progresser tout l’établissement »

Marie Godard, directrice générale adjointe Innovation, RH et Usages numériques de Paris Habitat, a reçu le prix « Mieux travailler à l’ère du numérique » pour le déploiement de CARL, un outil de mobilité et un processus de digitalisation du métier de gardiens d’immeubles. 1 100 collaborateurs de Paris Habitat (soit 40% des effectifs totaux) ont été équipés de l’outil.

CARL, pour « Continuité de l’activité et de la relation locataire », répond simultanément à deux enjeux essentiels, la qualité de service et l’amélioration des conditions de travail. « Le gardien d’immeuble, aujourd’hui », précise Marie Godard, « est loin de l’image d’Épinal du concierge. Il a une mission de surveillance du patrimoine, des immeubles, des parkings ; il doit faire intervenir les entreprises quand il identifie un désordre, réalise une veille sociale ; tout en assurant les missions plus traditionnelles comme sortir les ordures ménagères, etc. Il passe beaucoup de temps hors de sa loge, c’est un métier très mobile ».

L’outil CARL doit permettre aux gardiens d’immeuble de « travailler plus efficacement, en lien plus aisé avec les locataires, sans être bloqués dans leur loge ». Grâce à CARL, le gardien peut par exemple photographier un sinistre pour l’envoyer directement à l’entreprise qui sera chargée de le réparer, lui demander un devis, puis déclencher le bon de commande pour l’intervention. Auparavant, il devait prendre des notes, revenir à la loge, saisir les informations dans le système… « Les tâches administratives prendront moins de temps et peuvent se faire en mobilité. C’est une façon de valoriser un métier historique, en permettant au gardien de se recentrer sur la relation locataire et le lien social, qui font la valeur ajoutée de son activité. »

Comment est née l’idée de CARL ? « Nous avons interrogé les gardiens d’immeubles sur leur vision de leur métier aujourd’hui et demain. Parallèlement, la DRH a conduit une réflexion en lien avec la direction des usages numériques et la direction de la proximité. Il en est ressorti que selon les gardiens eux-mêmes, revenir constamment à la loge est une perte de temps. D’où cette idée de les équiper en mobilité ». L’innovation a ensuite été déployée « en mode projet, au plus proche des usages. Nous avons proposé à certains gardiens d’être référents, et nous les avons formés et accompagnés. » Pour compléter, des formations destinées aux gardiens qui n’étaient pas encore informatisés ont été délivrées au centre des métiers de Paris Habitat.

« L’un des effets collatéraux est que certains gardiens qui avaient refusé l’informatisation jusqu’à présent y sont venus grâce à Carl, ce qui est aussi très positif pour leur employabilité. » La démarche se poursuit, en tenant compte des retours d’expérience. De nouvelles applis vont être développées. Et demain ? « Nous souhaitons développer l’approche dans d’autres contextes, pour d’autres métiers », notamment les ouvriers de la régie et les gestionnaires de sinistres. Globalement, nous allons développer le travail en mobilité au sein de Paris Habitat, ainsi que le télétravail ».

Le projet a été conduit dans la recherche « d’une transformation digitale qui n’oppose pas humain et digital, proximité et numérique. » En outre, son déploiement « nous a beaucoup appris sur la façon d’accompagner la mise en œuvre de solutions délocalisées, sur des sites très nombreux. Le projet a fait progresser l’ensemble de l’établissement ».

 

Patrick Plein, Directeur digital working et Academy Vinci : un market place RH en ligne

Le prix « Disruption numérique RH » a été attribué à Patrick Plein du groupe Vinci, pour la mise en place de « HR Digistore », outil réseau de partage des initiatives en matière d’innovations digitales au sein du groupe.

Pour resituer la genèse du projet, il faut revenir quelques années en arrière. « Depuis 3 ou 4 ans, le groupe Vinci a développé une réflexion approfondie autour de l’accompagnement de la transformation digitale RH, au sens large. » En 2016, tous les DRH du groupe sont réunis en convention pour aborder ces questions. Le message qui en ressort est le suivant : le monde change, et il faut « faire du test and learn sur toutes ces questions de transformation digitale, expérimenter des dispositifs, essayer de nouvelles solutions. Mais Vinci est une entreprise très décentralisée, et il était difficile de savoir ce qui était advenu de cet appel. 8 ou 10 mois après l’événement, nous nous sommes dit qu’il serait intéressant de s’en enquérir. ».

C’est ainsi qu’est né le Digistore RH, qui se présente comme « une plateforme, un dispositif digital qui permet à chaque RH, en mode ouvert, de faire part de l’utilisation d’une solution, d’une expérimentation, d’un applicatif, puis de la partager auprès de ses pairs, de le noter en mode tripadvisor, de l’évaluer sur trois ou quatre critères – est-elle pertinente, facile à mettre en œuvre, onéreuse… C’est un système ouvert et interactif de capitalisation et de partage en matière d’innovation RH ».

L’outil est dédié à la filière RH et aux questions de prévention, santé, sécurité et conditions de travail. Mis en place en 6 semaines, le Digistore RH est un projet rapide assez peu coûteux. Il se présente sous la forme d’un applicatif web avec un moteur de recherche et des thématiques. « Au départ, il y avait deux onglets : un onglet « applicatifs et solutions », un onglet « startups ». Pour chaque entrée, une fiche donne la description, les appréciations, le contact de celui qui l’a mis en œuvre si c’est un applicatif, le nom du prestataire si c’est une startup que l’on recommande ».

En un an, le Digistore a attiré 1200 visiteurs uniques et 200 visites par mois. Rappelons que c’est un réseau interne ! « Nous estimons que c’est un bon retour, d’autant que les gens reviennent régulièrement. Plus de 130 solutions ont déjà été partagées. Pour le moment, la majorité des connexions viennent de France, mais certaines proviennent d’Angleterre. »

La deuxième étape a été d’inclure un nouvel onglet « HR Key » pour recommander des prestataires RH, par exemple pour le recrutement, le coaching, la formation… « Si j’ai besoin de quelqu’un pour faire un coaching à un collaborateur, je cherche sur la base et je trouve des prestataires qui ont déjà travaillé pour quelqu’un de Vinci, et dont on a été satisfait ».

Le Digistore RH permet donc de « capitaliser toutes les expériences RH, dans un contexte où on a parfois tendance à tout réinventer dans son coin. La plateforme permet de gagner du temps ».

« Rien de révolutionnaire », conclut modestement Patrick Plein ; mais assurément des résultats très concrets et transformateurs pour une initiative qui partait simplement d’une volonté de savoir si la stratégie RH énoncée avait été suivie d’effet !

 

Le prix du DRH numérique est organisé tous les ans par l’ANDRH depuis 2014. Cette année, les distinctions ont été remises le 22 novembre à Station F. 



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