“L’amélioration continue de l’expérience collaborateur réside dans une approche globale, où chaque étape du parcours du collaborateur est considérée”
Séverine Loureiro est psychologue du travail avec une expérience de plus de 15 ans en RH, actuellement responsable expérience collaborateur & engagement au sein d’un grand groupe. Conférencière active, elle est également autrice de plusieurs livres : « La petite boîte à outils de l’onboarding » (Dunod), « Le droit à l’erreur » (Dunod) et « Boostez l’expérience collaborateur de votre organisation » (Eyrolles), considérée comme référence sur les sujets de l’expérience collaborateur et des enjeux RH, sur lesquels elle partage régulièrement ses analyses et projections dans les médias.
L’expérience collaborateur influence l’épanouissement et le bien-être des employés : c’est un fait, désormais avéré. Ne se résumant pas, simplement, à la rémunération perçue par le salarié, elle s’étend au sens de sa mission, à sa contribution à une mission commune, en passant par ses possibilités d’évolution. À quoi ressemble une expérience collaborateur optimale ? Quels indicateurs clés de performance permettent de la mesurer ? Comment les innovations technologiques vont-elles l’influencer ? Entretien éclairant avec Séverine Loureiro1, Responsable engagement, Conférencière, Autrice, et VP du Lab RH, à l’occasion de la prochaine session de #24heuresRH dédiée à l’expérience collaborateur.
Quelle est, selon vous, l’importance de l’expérience collaborateur dans les organisations contemporaines ?
L’expérience collaborateur joue un rôle crucial dans les organisations modernes, influençant profondément l’épanouissement et le bien-être des employés à chaque étape de leur parcours au sein de l’entreprise. La relation collaborateur – employeur ne se limite plus à une transaction de type “compétences contre rémunération” ; elle représente plutôt une quête de sens et de contribution à une mission commune, où le bien-être et l’épanouissement personnel sont prioritaires. Les collaborateurs d’aujourd’hui recherchent un environnement qui, non seulement, reconnaît leur apport mais prend également soin de leur bien-être.
Enrichir l’expérience collaborateur, c’est répondre à ces attentes, en mettant en place des dispositifs visant à améliorer le bien-être et à favoriser l’épanouissement au travail. Ces initiatives ne bénéficient pas uniquement aux employés mais renforcent également l’attractivité de l’organisation. En effet, une marque employeur forte et distincte, nourrie par une expérience collaborateur positive, permet à une entreprise de se démarquer, même dans un secteur concurrentiel. Les stratégies d’expérience collaborateur deviennent alors un facteur déterminant pour attirer les talents, soulignant l’importance d’investir dans le bien-être et l’épanouissement des employés pour le succès global de l’organisation.
Comment définiriez-vous une expérience collaborateur optimale ?
Une expérience collaborateur optimale repose sur une vision cohérente, qui embrasse l’ensemble du parcours de l’employé au sein de l’organisation, depuis le moment où il en est encore candidat jusqu’à son éventuel départ, et même au-delà. La clé réside dans le fait de comprendre que l’expérience collaborateur ne se limite pas à des processus isolés comme un bon onboarding ou un programme de développement des compétences. Elle doit être intégrée et continue, touchant tous les aspects de l’interaction du collaborateur avec l’entreprise : avec son management, ses collègues, le projet d’entreprise, et l’organisation dans son ensemble.
Dès 2015/2016, à une époque où l’expérience collaborateur n’était pas encore au cœur des préoccupations des entreprises, j’ai souligné l’importance de ne pas dissocier l’expérience candidat de l’expérience collaborateur. Considérer ces deux expériences comme distinctes peut créer un fossé entre les attentes établies lors du recrutement et la réalité vécue une fois dans l’entreprise, ce qui peut être profondément déceptif pour le collaborateur. Ainsi, l’expérience candidat devrait être vue comme une “pré-expérience collaborateur”, marquant le début d’un parcours qui se veut sans fin, où l’offboarding est à considérer comme une étape clé.
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Quels sont les indicateurs clés de performance (KPI) essentiels pour mesurer l’expérience collaborateur ?
Mesurer l’expérience collaborateur est complexe car elle repose sur des perceptions et des sentiments subjectifs plutôt que sur des données quantifiables pures. Néanmoins, il existe des indicateurs clés de performance essentiels pour évaluer cette expérience, centrés principalement autour de la satisfaction des collaborateurs.
Le turnover, l’absentéisme, l’engagement des employés, le Net Promoter Score (NPS) employé, la réalisation des objectifs individuels et collectifs, la participation aux formations ou encore les feedbacks 360 degrés, peuvent être analysés comme des indicateurs de compréhension de l’expérience collaborateur, comme signaux faibles. Ces indicateurs nécessitent une interprétation soignée pour isoler leur impact sur l’expérience.
Cette satisfaction ne peut être pleinement saisie qu’à travers un dispositif d’écoute actif, où les retours des employés sur leur quotidien sont recueillis pour identifier et améliorer les points de friction qu’ils vivent au quotidien. Un autre KPI essentiel serait donc l’évolution de la satisfaction des collaborateurs, mesurée par des enquêtes régulières et des sessions de feedbacks. Le suivi de cette satisfaction et la réduction des irritants signalés par les collaborateurs servent d’indicateurs directs de l’amélioration de l’expérience collaborateur. Par conséquent, un dispositif d’écoute efficace, capable de capter ces retours et de les transformer en actions concrètes, est indispensable.
Quels défis les organisations rencontrent-elles généralement dans le suivi et l’amélioration de ces KPI ?
L’un des principaux défis rencontrés par les entreprises dans le suivi et l’amélioration de l’expérience collaborateur réside dans la capacité à établir un dispositif d’écoute qui englobe tout le parcours du collaborateur.
Je suis convaincue que l’essence de l’amélioration continue réside dans une approche globale, où chaque étape du parcours du collaborateur est considérée. Trop souvent, les entreprises se concentrent sur les phases initiales comme le recrutement et l’intégration, mais négligent les étapes ultérieures, ce qui peut laisser des lacunes dans la compréhension de l’expérience vécue par les collaborateurs.
Le défi est donc de maintenir un dialogue ouvert et pertinent, capable d’identifier et de suivre l’évolution des points de friction à travers toutes les phases de l’expérience collaborateur. Cela demande une réflexion approfondie sur les questions à poser et sur la manière d’engager les équipes dans ce processus d’évaluation continue, pour véritablement saisir et améliorer leur perception de l’entreprise.
Comment relever ce défi ?
Pour améliorer l’expérience collaborateur, le premier pas vers l’efficacité consiste à identifier les moments clés spécifiques au parcours des employés au sein de l’entreprise. Bien qu’internet regorge de listes, je crois fermement que chaque organisation a ses spécificités qui définissent ces étapes. Certains moments, comme les promotions, l’onboarding ou les entretiens annuels, peuvent se retrouver dans toutes les organisations. Toutefois, il existe des moments clés uniques spécifiques à l’entreprise, inhérents à son organisation, à ses processus et même à son activité.
Mon conseil serait donc de commencer par cette cartographie des moments clés, en les adaptant à la réalité de l’entreprise. Puis, il est crucial de mettre en place un système d’écoute adapté à ces moments. Ce système ne se limite pas à un questionnaire par email. Il s’étend à divers canaux de communication, et notamment les managers.
Ceux-ci sont, en effet, au cœur de ce dispositif d’écoute. Ils sont au quotidien avec leur équipe, comprennent ses défis et sont idéalement placés pour capter les signaux, positifs ou négatifs. L’intégration des managers dans ce processus n’est pas simplement souhaitable, elle est indispensable
Ce double effort permet de suivre de près et d’améliorer continuellement la satisfaction globale des collaborateurs tout au long de leur parcours au sein de l’organisation.
Comment envisagez-vous l’évolution de la mesure et de l’amélioration de l’expérience collaborateur avec l’avancée de l’IA ?
Avec l’évolution technologique, je vois un potentiel immense pour améliorer la mesure et l’optimisation de l’expérience collaborateur. À une condition : que ces outils soient intégrés avec discernement. Leur utilisation doit être guidée par une stratégie claire et des objectifs bien définis en matière d’expérience collaborateur. L’adoption technologique doit avoir du sens en veillant à ce qu’elle complète et enrichisse l’interaction humaine plutôt que de la remplacer.
Les outils, notamment ceux basés sur l’IA, peuvent jouer un rôle clé dans la détection des signaux faibles, en analysant de grandes quantités de données pour prévenir des situations telles que le burn-out. Cependant, ces technologies ne remplacent pas le contact humain ni l’écoute active. Lorsqu’un système alerte sur un risque potentiel, cela ne doit pas mener à des conclusions hâtives sur l’état d’un collaborateur. Il est essentiel de compléter cette analyse par une discussion avec le manager et/ou le collaborateur concerné pour comprendre le contexte spécifique.
L’IA peut également être utile pour croiser différents indicateurs, comme le taux d’absentéisme et le turnover, et ainsi détecter des tendances ou des anomalies qui méritent une attention particulière. Ces alertes peuvent être le point de départ pour une enquête plus approfondie, menée par les responsables RH ou les managers, pour identifier les causes sous-jacentes des problèmes détectés et y apporter les corrections nécessaires.
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- Autrice de plusieurs livres sur les enjeux RH et managériaux, et notamment : « Boostez l’expérience collaborateur de votre organisation » (Eyrolles) et « La petite boîte à outils de l’onboarding » (Dunod) ↩︎
Crédit photo : Shutterstock / Gorodenkoff