Start-up numériques : les dessous RH de la performance
Les start-up numériques françaises grandissent, recrutent et partagent les gains : c’est en résumé le message du Baromètre 2016 de la performance économique et sociale des start-up numériques en France réalisé par EY et France Digitale. 94% d’entre elles ont recruté en 2016 ou pensent le faire, et plus de la moitié associent leurs salariés au capital d’une manière ou d’une autre. Le magazine Chef d’Entreprise a compilé une longue infographie pour restituer les principaux résultats de l’étude ; nous en commentons ici les plus « RH »!
Les jeunes pousses digitales prospèrent sur le terreau français, selon l’enquête conduite par EY et France Digitale auprès de 224 entreprises. Mais derrière le succès, se dessine une pratique de l’organisation en rupture avec les modèles habituels.
Sommaire
Une croissance vigoureuse
Les entreprises interrogées ont réalisé un chiffre d’affaires cumulé de 4,2 milliards d’euros en 2015, soit 39% de plus qu’en 2014. Plus de la moitié de ce volume d’affaires a été réalisé à l’étranger, contre 45% en 2014 et 33% en 2012. Le CA réalisé à l’international par les start-up interrogées a ainsi augmenté de 57% entre 2014 et 2015.
Toutes ont réalisé des levées de fonds au cours des années récentes, ce qui est logique, l’enquête étant effectuée à partir de questionnaires envoyés par les capital-risqueurs aux entreprises dans lesquelles ils ont investi. Ces levées atteignent cependant 2,8 milliards en 2015, contre 1,8 milliard l’année précédente. Les plus petites sont les plus nombreuses à bénéficier d’apports de capital – sans doute parce qu’elles sont en moyenne à un stade plus précoce de leur croissance.
Des effectifs en expansion
Les start-up numériques recrutent : les effectifs de l’échantillon (que l’on suppose calculés à périmètre constant, le chiffre donné ici pour 2014 étant plus élevé que celui du baromètre de l’année dernière) ont crû de 27%, à 13 809 salariés. Soit près de 3000 emplois créés, dont plus de deux sur trois en France, et 862 à l’étranger. Ces recrutements présentent au moins deux caractéristiques qui les éloignent de la « normale » :
- Il ne s’agit pas d’emploi précaire, puisque 92% des nouvelles recrues sont en CDI, et seulement 3% en CDD. En 2015, dans l’économie française prise globalement, 85% des salariés étaient en CDI, mais 87% des embauches ont eu lieu en CDD, le plus souvent très courts.
- Sans surprise, on parle surtout de profils très qualifiés : Les trois quarts des embauchés ont au moins un niveau bac+4, et seuls 4% ont un niveau bac ou en-dessous.
Autre différence, concernant les effectifs : si le management présente une moyenne d’âge (39 ans) proche de celle de la population active française (40 ans), celle des employés n’est que de 31 ans. En revanche, mauvais point sur la parité : les start-up dirigées par des femmes ne représentent que 8% de l’échantillon. Or, en France, les dirigeantes représentent 14% des chefs d’entreprise (de 10 salariés et plus, il est vrai).
Le partage des fruits de la croissance
Les start-up répondantes pratiquent en moyenne un ratio de salaire management/personnel de 2,4, même si on peut monter à 13,2 et descendre à… 0,5, c’est-à-dire une situation où le management est deux fois moins payé que le personnel. Cette variété de situations n’est pas en soi très étonnante pour un échantillon de petites entreprises récemment créées : le dirigeant ne se paie pas toujours au début !
Le mode de rémunération est lui aussi tributaire de la jeunesse des entreprises : seules 31% ont un excédent brut d’exploitation positif (mais 91% de celles qui font plus de 50 millions d’euros de CA). Pas étonnant dans ces conditions qu’elles n’aient été que 3% à distribuer des dividendes.
Mais il y a sans doute aussi une dimension culturelle dans le choix des outils de redistribution : 98% des entreprises de l’échantillon associent des salariés au capital, essentiellement (à 70%) par le biais de bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE). Un peu plus de la moitié des salariés en détiennent, une proportion qui monte à 75% dans les entreprises qui réalisent plus de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. C’est-à-dire celles qui fonctionnent le mieux. Lien de cause à effet ?
Si l’on veut être prudent, il est encore trop tôt, sans doute, pour affirmer que les start-up numériques sont en train d’inventer un nouveau modèle d’organisation, mais cela commence à y ressembler beaucoup. Et la dynamique se poursuit : les entreprises interrogées sont 94% à envisager d’embaucher en 2016 – pour moitié, des développeurs-programmeurs. Reste à savoir dans quelle mesure ces pratiques RH sont exportables au reste de l’économie, dans les secteurs plus traditionnels.
Sources : Chef d’Entreprise, EY
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