RSE : la fonction RH sera responsable ou ne sera pas
La question n’est plus de savoir s’il faut se distinguer par une politique RSE sincère, ambitieuse et transparente. La question est de savoir laquelle. Et la fonction RH détient une part importante de la réponse.
La RSE n’en finit pas de s’excuser de demander pardon. On la soupçonne souvent de duplicité, parfois à juste titre. Pour beaucoup, la RSE désigne toutes ces choses que l’entreprise feint de n’être pas obligée de faire mais qu’elle fait quand même parce qu’elle est bien gentille. Avec un agenda caché fait de stratégie de marque, de diversion et d’optimisation fiscale.
C’est de moins en moins vrai, pour des raisons que le DRH est l’un des mieux placés pour comprendre et pour expliquer. De même que le consommateur se méfie de plus en plus du « RSE washing », les salariés et les candidats se montrent de moins en moins dupes des promesses formelles de la RSE packagée. Face aux conséquences concrètes de l’instabilité climatique et des tensions sociales, face au sentiment d’impuissance qu’ils ressentent, ils sont en demande d’engagements vrais et vérifiables. Las qu’on attende d’eux qu’ils fassent les colibris au-dessus de l’incendie, ils attendent l’intervention des Canadair. Et les entreprises, si elles le veulent, peuvent en former une puissante escadrille.
Nous sommes entrés dans un cycle législatif qui va, inévitablement, créer rapidement de nouvelles contraintes aux entreprises pour les inciter à aller dans le bon sens. La veille, voire la prospective juridique sont indispensables : il ne faut pas passer à côté d’un bon outil. Mais les stratégies RSE ne peuvent pas se construire simplement en réaction à l’actualité légale. La fonction RH, qui entend les salariés et les candidats, est particulièrement bien placée pour être l’ambassadeur, voire le précurseur de l’action RSE au sein de l’entreprise.
La fonction RH, oracle de la RSE
Quels sujets faudra-t-il privilégier ? C’est à chaque organisation de le dire. Le business de l’entreprise en dicte certains. En dehors des petits privilégiés dont l’activité même est RSE, les entreprises disposent d’un vaste choix d’interventions. Entre la responsabilisation de la production, l’action dans la cité et la politique RH interne, toutes les initiatives sont possibles. L’adhésion des collaborateurs, cependant, est un prérequis, et leur perception des différents thèmes possibles fait partie des critères déterminants.
Le DRH ne va pas construire la politique RSE tout seul avec ses petites mains. Mais il détient, dès lors qu’il est – professionnellement – à l’écoute des attentes des différents publics de collaborateurs, l’une des clés de la stratégie RSE : les attentes des collaborateurs en la matière.
L’impact environnemental : un combat RH
Dans la forêt des thèmes RSE, l’urgence climatique prend des allures de montagne. Si elle n’est pas traitée, les autres questions perdent leur sens.
Mais techniquement, seul le « S » de RSE, et encore, pas tout le « S », relève directement de la fonction RH. Que dire alors du « E » ? Ce n’est pas le service RH qui va aller calculer le bilan carbone de la production ou l’impact d’une implantation sur la biodiversité. Certes. Mais RH et RSE sont bel et bien liées. La politique environnementale peut requérir le recrutement de nouveaux profils, affecter la mobilité des collaborateurs et donc l’organisation, entraîner des choix techniques en matière de SIRH… C’est au RH, également, qu’il revient de sensibiliser salariés et candidats aux contraintes environnementales. La politique RH peut aussi avoir des conséquences environnementales vertueuses. Un plan de mobilité intelligent, un accord de télétravail… tout cela réduit l’empreinte carbone.
Dominant le « S », partenaire du « E », le DRH, dans beaucoup de contextes d’entreprises, peut légitimement lever l’étendard de leader de la RSE. Et il y a fort à parier que beaucoup le feront.
La RSE au service de la fonction RH
« S » et « E » diffèrent encore d’une autre manière. Les questions environnementales nous projettent dans les moyen et long termes. Le retour sur investissement d’une politique environnementale est réel, mais pas immédiat. Pour le « S », en revanche, la récompense est plus rapide. Diversité et inclusion
améliorent les performances de l’entreprise. En réalité, un DRH qui fait bien son travail fait de la RSE. Combattre les biais de genre, d’âge, de diplôme ou d’origine garantit une meilleure adéquation des postes et des compétences, des bassins de recrutement plus larges, des équipes reflétant et comprenant mieux la société. Recruter des jeunes en alternance permet de former des profils « maison ». Intégrer et maintenir en emploi les travailleurs en situation de handicap permet de garder des compétences et d’en trouver de nouvelles. Sur tous ces points, il faut ajouter le bénéfice des aides publiques et/ou la réduction des pénalités.
Revers de la médaille, les DRH pourront-ils longtemps afficher comme « RSE » des objectifs qui relèvent aussi directement du propre intérêt de l’entreprise ?
D’une RSE de moyens à une RSE de résultat
La principale qualité de l’outil « entreprise », c’est sa capacité à faire les choses. L’entreprise est une organisation d’humains et de machines tournée vers un but, et qui sait atteindre ce but avec
une efficacité inégalée dans l’histoire.
La RSE ne doit pas être une action caritative qui compte par son intention, mais un projet d’entreprise qui se fixe des objectifs ambitieux et les remplit. Elle ne doit pas se fonder sur une obligation de moyens mais sur un impératif de résultats. C’est la logique des sociétés à mission créées par la loi PACTE.
Bien sûr, les budgets ne sont pas extensibles et il faut faire des choix. Mais des choix bien informés doivent permettre de maximiser l’impact des actions RSE. C’est le sens de la plateforme Impact lancée par le gouvernement et des partenaires entrepreneuriaux fin 2021. L’initiative invite tous les acteurs économiques à se rassembler, à partager leurs indicateurs de réussite RSE et à échanger les savoir-faire. Le manifeste que les participants sont invités à signer commence par ces phrases éloquentes : « Face à l’urgence climatique et sociale, les citoyens et les entreprises ont compris qu’il fallait changer de modèle. Mais quand les premiers demandent « quand ? », les secondes se demandent « comment ? ». Excellent résumé : l’entreprise reste la meilleure spécialiste du « comment ».
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