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Marque employeur : l’alimenter, la distinguer, la faire vivre

le 17 novembre 2016
crayon rouge sortant d'un alignement de crayons noirs pour évoquer l'importance de la marque employeur

[DOSSIER 2/3] Un précédent article vous a permis de revivre la relation en dents de scie entretenue pendant vingt ans entre les entreprises françaises et leur marque employeur. Depuis deux ou trois ans, celle-ci fait un retour en force en tant que sujet prioritaire pour les DRH, et tous les éléments sont rassemblés aujourd’hui pour qu’elle le reste longtemps. Comment construire un socle solide pour asseoir votre marque employeur ? Comment l’alimenter, la distinguer et la faire vivre d’ici à 2020 ? Tour d’horizon des fondamentaux.  

 

La promesse employeur : sincérité d’abord

Comme toute marque, la marque employeur doit être porteuse d’une promesse auprès de ses cibles principales. Cette promesse est un préalable indispensable pour exister. Curieusement, la mise en place d’une promesse employeur n’est pas automatique en France, y compris au sein des grandes entreprises pourtant a priori plus en pointe sur le sujet que les PME. D’après une étude du cabinet Universum conduite en 2016 auprès de 2 500 professionnels RH dans 30 pays, seule une entreprise sur deux considère la promesse employeur comme la pierre angulaire de sa marque employeur. La même étude révèle cependant que 65% des organisations de 1 000 à 10 000 salariés planifient le développement de cette promesse dans un avenir proche. La prise de conscience est donc là, du moins au sein des grandes structures.

Premier commandement dans une société que la digitalisation rend chaque jour plus demandeuse de transparence : la sincérité. D’après une étude du Boston consulting group consacrée à la génération Y, le meilleur moyen d’engager et d’attirer les talents est de donner l’image la plus sincère possible de l’entreprise. De fait, les candidats veulent connaître la réalité de la vie chez l’employeur potentiel, les gens avec qui ils seront amenés à travailler, la nature précise des missions qu’on leur confiera. L’employeur a tout intérêt à prendre en main lui-même la diffusion de ces informations sans chercher à les enjoliver ou les travestir, car elles circulent déjà souvent sur les réseaux sociaux. De fait, selon une autre étude de Webershandwick, 50% des employés postent déjà des commentaires ou contenus concernant leur employeur, dont plus d’un tiers sans que ce dernier n’en ait connaissance. Notons aussi que 15% d’entre eux postent des avis négatifs.
 

 

Quand la marque se démarque

La sincérité de la promesse n’étant pas négociable, il apparaît dès lors moins évident de diffuser un message original, réellement différenciant vis-à-vis de la concurrence. Beaucoup d’entreprises se focalisent ainsi sur des promesses banales : le développement professionnel, l’épanouissement personnel et l’ambiance de travail, voire l’innovation. Mais quelle entreprise, aujourd’hui, ne s’efforce pas de développer ses talents ? Quel groupe ne s’emploie pas à innover ? Avoir la même promesse que tous les concurrents, c’est aux yeux des candidats n’en avoir aucune.

Effectuer un benchmark de perception externe, mais également interne auprès des collaborateurs, peut apporter une aide précieuse pour construire une promesse employeur singulière, originale, à même de marquer les esprits. Qui, mieux que les collaborateurs en poste, connaît les atouts de son entreprise en tant qu’employeur ? Qui, mieux qu’eux, connaît les valeurs en cours au sein de l’entreprise ? Une fois la promesse élaborée et validée par la Direction de l’entreprise, puis testée auprès des salariés et d’un panel de candidats, la marque employeur va disposer d’un socle pour communiquer selon une ligne éditoriale précise.

Mettre en lumière sa différence ne passe pas que par l’originalité de la promesse : la créativité avec laquelle celle-ci sera mise en scène est tout aussi importante, et va se jouer à deux niveaux :

  • la formulation des messages : le community management est un métier, le community mangement RH une expertise. Attention, donc, à ne pas confier la prise de parole employeur à une personne non formée pour cet exercice. Le recours à un concepteur-rédacteur professionnel, idéalement via une agence de communication spécialisée, n’est pas non plus à négliger. Il pourra notamment élaborer une « signature employeur », aussi décisive pour le rayonnement de la marque employeur que la signature ou baseline associée à une marque commerciale.
  • les médias retenus : si une majorité d’employeurs investissent aujourd’hui les réseaux sociaux  pour recruter, il existe de nombreuses façons de le faire. Qu’il s’agisse de Linkedin, Viadeo ou Twitter, un community management RH bien conçu sur ces réseaux permet d’accroître fortement la visibilité des messages de l’employeur. Certains médias, par exemple des vidéos pas forcément coûteuses mais créatives, peuvent également donner une forte attractivité au contenu. Il est, dans tous les cas, indispensable de ne pas se contenter d’une communication unilatérale, la marque employeur ne prenant réellement vie qu’à travers le dialogue. Des plateformes de discussions ou live-chats sur le site carrières de l’employeur rendent possible une conversation directe entre collaborateurs et candidats, ces derniers obtenant ainsi facilement des réponses aux questions qu’ils se posent.

En résumé, se distinguer le plus possible de la concurrence est un impératif, mais il ne faut pas s’y plier dans l’improvisation. La démarche doit être sérieusement pensée en amont et rigoureusement encadrée dans sa mise en œuvre.

 

Quels contenus pour irriguer la marque employeur ?

Il ne suffit pas de choisir le bon média pour toucher ses cibles : la nature et le ton du propos sont évidemment décisifs. Raconter par le menu l’histoire de l’entreprise ne correspond pas aux attentes actuelles des candidats. Les témoignages formatés sur les conditions de travail ont, eux aussi, fait long feu. Les contenus à même de porter la marque employeur peuvent être aujourd’hui de tous ordres, dès l’instant qu’ils sont à la fois informatifs sur l’entreprise et attrayants dans la forme. À titre d’exemple, il est possible de parler :

  • de valeurs : quand elles s’incarnent concrètement dans le quotidien professionnel des collaborateurs, les valeurs de l’entreprise font toute la valeur de l’employeur ! À titre d’exemple, la solidarité transforme un esprit d’équipe virtuel en réalité opérationnelle dans le travail ; l’empathie donne une coloration particulière au management ; l’esprit d’innovation est la garantie d’un environnement dynamique. Il ne s’agit pas d’inventer, mais de communiquer sur des réalités, et de travailler à tous les niveaux de l’entreprise – de l’organisation au management, nous y reviendrons – pour accentuer la réalité de ces valeurs.
  • de l’actualité de l’entreprise : comment innove-t-elle en ce moment sur ses marchés ? A-t-elle connu un beau succès qu’elle souhaite partager ? Quels sont ses projets de développement ? L’un de ses produits ou l’une de ses offres a-t-il récemment reçu une récompense ?
  • de la vie dans l’entreprise : les salariés ont-ils organisé une fête ? Ont-ils participé à un séminaire donnant lieu à un épisode sportif ou ludique ? Des vidéos témoignant d’une bonne ambiance de travail, même (surtout !) filmées au portable près de la machine à café, auront la saveur de l’authenticité.
  • de la procédure de recrutement : combien d’entretiens faut-il traverser ? Comment se déroule le on-boarding ? Autant de sujets qui intéressent les candidats potentiels et leur donnent une idée de ce qui les attend s’ils décident de postuler.

Quels que soient les sujets abordés pour donner de la consistance à une marque employeur, l’essentiel est de rester vrai et… de ne pas se prendre trop au sérieux. L’humour est toujours un signe fort de qualité d’ambiance au travail et d’esprit d’équipe, plus éloquent que les déclarations d’intention dans ce domaine.

 

Se souvenir qu’un salarié est… un ancien candidat

Venons-en à présent à ce qui constitue la grande faiblesse de la marque employeur en France, la raison pour laquelle elle n’a su ou pu apporter, en vingt ans, un bénéfice pérenne à l’entreprise.

Les organisations qui intégreront les premières cette vérité prendront dix ans d’avance sur les autres : la marque employeur ne se limite pas à un outil destiné au seul recrutement. Comme évoqué dans le précédent article de ce dossier, elle adresse bien d’autres cibles que les candidats. La première d’entre elles, celle qui joue le rôle le plus important au sein de l’entreprise, mais également au-dehors, est le salarié. Selon l’étude Universum déjà citée, près de 70% des entreprises concentrent leurs efforts sur le on-boarding et la qualité de l’expérience candidat : parallèlement, elles sont moins de 20% à s’intéresser au départ des salariés à travers le prisme de la marque employeur. Comment, à l’heure du digital roi où les informations circulent librement et à grande vitesse sur les réseaux sociaux, une telle hérésie stratégique est-elle possible ?

Attirer les talents est une chose, les fidéliser en est une autre. Y parvenir implique de tenir ses promesses sur le court, le moyen et le long terme, et ce pour deux raisons majeures :

  • recruter un nouveau talent, au moins du même niveau de qualité que celui qui quitte le navire, coûte cher et comporte un certain nombre de risques ;
  • chaque collaborateur qui quitte l’entreprise parlera de celle-ci en fonction du dernier souvenir qu’elle lui aura laissé : à ses relations, à son réseau professionnel… et très probablement aussi sur les réseaux sociaux.

Le grand défi de la marque employeur est aujourd’hui de grandir et de rayonner à l’extérieur à travers les collaborateurs de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’une option, mais d’un impératif imposé par les usages digitaux qui prévalent maintenant dans toute la société, et pas seulement chez les générations Y et Z.

 

Il existe aujourd’hui une prise de conscience, chez de nombreux employeurs, de la nécessité d’optimiser l’expérience salarié. Dérivé de la notion d’expérience candidat, elle-même inspirée de l’expérience client, ce vocable témoigne par son existence même d’un changement de regard sur la relation employeur-collaborateur. Pour l’heure, ce regard reste hélas trop déconnecté de la marque employeur. Ceci fera l’objet du troisième article de ce dossier.

Ci-dessous, les 3 tribunes sur le nouveau souffle de la marque employeur

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Crédit photo : © Shutterstock / jamesteohart

 

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Véronique Tomme-Dumont2016-12-03 12:17:02
Un grand merci pour cet article inspirant...

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