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Les cadres, au cœur de l’expérience collaborateur

le 19 décembre 2024
Les cadres, au cœur de l’expérience collaborateur

On n’attire plus les candidats avec de fausses promesses, constate Vanessa Robert, directrice RH et RSE de l’Apec. Raison de plus pour soigner les cadres, pivots stratégiques de l’expérience collaborateur.

Avant de devenir DRH de l’Apec en novembre 2021, Vanessa Robert a passé presque 20 ans au groupe La Poste. « Une grande maison » dotée de « valeurs très fortes », et dans laquelle elle expérimente toutes les facettes de la fonction RH. Son dernier poste y sera celui de DRH de la Banque Postale consumer finance, pendant 6 ans. « Nous avions plusieurs mantras RH, dont l’un était « à la Poste, on ne fait pas de plans sociaux » ! Cela oblige les RH à faire preuve de beaucoup d’inventivité. » À cet héritage s’ajoutent « des valeurs auxquelles je suis très attachée : l’audace, le goût du risque, l’humain ». Pour Vanessa Robert, la fonction RH « ne doit pas se cantonner à sa dimension juridico-administrative », mais doit jouer pleinement son rôle d’influence sur la prise de décision des dirigeants et d’optimisation de l’expérience collaborateur.

LES FAUSSES PROMESSES NE PASSENT PLUS

Vu de l’Apec, où en sont les entreprises sur ces questions ? « Certaines commencent à agir. Les attentes des salariés évoluent et poussent les entreprises à bouger. » En particulier, « les questions de QVT sont devenues majeures », et l’enjeu est désormais de « trouver un équilibre entre des attentes de plus en plus individualisées et le besoin d’une dimension plus communautaire autour de la vie en entreprise ». L’évolution est particulièrement sensible dans le domaine qui est celui de l’Apec, à savoir l’emploi des cadres. « Aujourd’hui, c’est de plus en plus à l’entreprise de se vendre, en montrant quelle expérience collaborateur elle est en mesure d’offrir à son futur salarié. » Certes, les notions de promesse et marque employeur ne datent pas d’hier. Mais « pendant longtemps, il y a eu beaucoup d’affichage de façade, ce qui se traduisait souvent par du désenchantement à l’arrivée dans l’entreprise ». Aujourd’hui, ça ne passe plus. « Certains collaborateurs quittent l’entreprise pendant la période d’essai si ce qu’on leur a vendu ne correspond pas à ce qu’ils trouvent. La contrefaçon de marque employeur ne paie plus. Surtout que chez les cadres, en particulier chez les plus jeunes, la mobilité est assez élevée. »

ÉCOUTER ET AGIR

Au sein même de l’Apec, la prise en compte de l’expérience collaborateur est fermement revendiquée. Un système de tracking a été mis en place avec un prestataire, pour repérer « les points d’enchantement et les points qui posent problème dans la vie des collaborateurs et collaboratrices ». Le dispositif permet d’identifier les sujets prioritaires, RH ou autre. Ce suivi est doublé d’un baromètre social déployé deux fois par an, avec des questions récurrentes et des focus thématiques. Il ne suffit pas d’écouter, encore faut-il agir. Les remontées du terrain ont ainsi conduit à modifier l’organisation RH. L’Apec compte 1 100 collaborateurs répartis dans toute la France, mais les RH étaient « centralisées autour d’une équipe du siège. Les équipes se plaignaient de ne pas beaucoup voir la fonction RH. Nous avons donc mis en place un nouveau métier de RH de proximité, sous la forme de référents généralistes présents sur l’ensemble du territoire ». Autre exemple : « les collaborateurs trouvaient que les processus de décision n’étaient pas suffisamment lisibles et rapides. » En réaction, par exemple, le temps de validation des feuilles de route annuelles présentées par les délégués régionaux à la DG passe de deux ou trois mois à 48 heures.

LA FORCE DU DIALOGUE SOCIAL

Parallèlement à ce circuit de changement, Vanessa Robert réhabilite le dialogue social, qui est, pour elle, « en soi, un dispositif de remontée des sujets expérience collaborateur ». Le travail avec les partenaires sociaux se réorganise autour d’un agenda de négociation sur deux ans. Sur la période 2023/2024, un chantier est ainsi conduit sur l’égalité salariale femmes-hommes, qui permet de maintenir un indice d’égalité professionnelle de 97 sur 100 et surtout un écart maîtrisé en matière de rémunération comparée à profils identiques (2,2 pour l’Apec vs 7,1 % au national). Une démarche sur la GEPPMM est mise en place dans une logique de co-construction, conduisant à la négociation d’un accord social. Une façon de rappeler que l’expérience collaborateur est d’abord une attitude : une fois celle-ci adoptée, des outils nouveaux se mettent en place, d’anciens dispositifs se réorganisent, le tout en fonction d’une logique d’écoute des besoins et de déploiement de solutions.

LES CADRES, OBJETS ET SUJETS DE L’EXPÉRIENCE COLLABORATEUR

L’expérience collaborateur se pense-t-elle différemment vis-à-vis des cadres ? Conceptuellement, non, mais il y a des attentes spécifiques ou plus répandues dans cette population : la fierté d’appartenance, l’autonomie, la liberté d’organisation (la moitié d’entre eux « démissionneraient si l’entreprise supprimait le télétravail », selon une enquête de l’Apec)… Le sujet du temps revient souvent : « ce que disent les managers, c’est qu’ils manquent de temps pour remplir leur mission. C’est un élément clé sur lequel les entreprises doivent agir. » Et ce, d’autant plus que le métier a changé : « les managers restent très attachés à leur fonction, mais celle-ci a beaucoup évolué. Face aux nouvelles attentes des équipes, il faut arriver à trouver le point central entre équilibre individuel et collectif, tout en gérant la répartition de la charge de travail dans un contexte de flexibilité accrue et de télétravail. » Face à ces transformations, « l’entreprise doit accompagner les managers à la fois en tant que salariés et en tant qu’acteurs de l’expérience collaborateur de ceux qu’ils managent ». D’où l’importance cruciale de l’expérience manager ! « Je dis souvent aux managers que sans eux, la fonction RH n’existe pas. La promotion des collaborateurs, par exemple, suit un process RH, mais c’est bien le manager qui le met en œuvre. Fonction RH et fonction managériale sont indissociables. » Le rôle du manager est donc plus essentiel que jamais. D’où l’intérêt de distinguer manager et managé dans le suivi de l’expérience collaborateur, comme le fait l’Apec. L’analyse des points de convergence et de divergence est très instructive : « C’est un exercice très riche, que je conseille aux DRH. Il permet d’avoir une vision très claire et précise de ce sur quoi il faut travailler ».

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Crédit photo : Christophe Boulze



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