Égalité de traitement et avantages catégoriels : la nouvelle position de la Cour de cassation
Par un arrêt du 27 janvier 2015, la Cour de cassation, qui était amenée à se prononcer sur la validité de plusieurs dispositions de la convention collective Syntec qui opèrent une distinction entre les cadres et non cadres (préavis en cas de licenciement, modalités de calcul de l’indemnité de licenciement, etc), est venue préciser que « les différences de traitement entre catégories professionnelles opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs, négociés et signés par des organisations syndicales représentatives, investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote, sont présumées justifiées de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toute considération de nature professionnelle ».
Cet arrêt de la Cour de cassation change beaucoup de choses
La Cour de cassation considère ainsi désormais que les différences d’avantage entre catégories professionnelles sont présumées justifiées. Tel n’était pas le cas jusqu’à cette décision. En effet, en cas de contestation d’une disposition d’une convention collective, il appartenait jusqu’alors à l’employeur de prouver que la différence d’avantage opérée entre catégories professionnelles, notamment cadres et non cadres, repose sur des raisons objectives dont le juge devait contrôler la réalité et la pertinence compte tenu des spécificités de la situation des salariés relevant d’une catégorie déterminée, tenant notamment aux conditions d’exercice des fonctions, à l’évolution de carrière ou aux modalités de rémunération.
Cette décision de la Cour de cassation, qui ne peut qu’être approuvée, est importante à plusieurs égards.
Tout d’abord, en prévoyant une présomption de justification des différences prévues entre catégories professionnelles pour l’octroi d’un avantage, la Cour de cassation reconnaît une très grande légitimité aux accords négociés par les partenaires sociaux qui doivent disposer d’une marge d’appréciation dans la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement. La Cour souligne à cet égard le rôle des organisations syndicales qui est la défense des intérêts et des droits des salariés.
Ensuite, la charge de la preuve est inversée. Il appartient dorénavant au salarié ou à toute organisation syndicale qui contesterait la validité d’une disposition conventionnelle de démontrer que celle-ci est « étrangère à toute considération de nature professionnelle ». C’est là une nouvelle formulation qui est plus large que l’exigence qui existait jusqu’alors pour l’employeur de justifier les différences d’avantage par des raisons objectives et pertinentes.
Une telle preuve risque en pratique de ne pas être facile à apporter. En effet, il ne sera pas aisé de démontrer que les partenaires sociaux ont adopté une disposition sur la base de considération non professionnelle.
Cette décision vient enfin conforter toutes les conventions collectives qui prévoient des avantages différenciés selon les catégories professionnelles et qui étaient de plus en plus contestées sur le principe de l’égalité de traitement. Si la contestation demeure possible, elle devrait néanmoins à l’avenir être plus limitée compte tenu de cette nouvelle position de la Cour de cassation.
Cass. soc. 27 janvier 2015 n° 13-22.179 FS-PBRI, Fédération nationale des personnels des sociétés d’études, du conseil et de prévention CGT c/ Fédération des syndicats des sociétés d’études et de conseils, et a.
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