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Utiliser GPT-4 pour identifier les métiers RH transformés par… GPT-4 !

le 03 avril 2023

Après deux décennies passées à transformer la fonction RH, il est temps de tirer les enseignements de l’histoire, et de s’adapter proactivement à la révolution technologique qui se profile avec l’arrivée de GPT-4 et des autres IA génératives.

A ce stade du développement des technologies d’IA génératives, il devient impossible de nier le fait qu’elles risquent d’avoir un impact certain sur de nombreuses activités liées au travail. Et c’est pareil pour les activités RH. Cela signifie donc que certains métiers vont devoir évoluer, pour continuer à être autant utiles que compétitifs. Car à n’en pas douter, le gain de productivité est tel que la logique de marché l’emportera, qu’on le veuille ou non !

L’évolution contrainte des métiers par la technologie

En 2023, par exemple, un recruteur a besoin des réseaux sociaux et de leurs moteurs de recherche pour faire son sourcing de candidats. Ces algorithmes n’ont pas remplacé le recruteur, ils ont rendu le métier plus exigeant, notamment sur les qualités humaines nécessaires pour intéresser un candidat. Mais ce dont on parle moins, ce sont les recruteurs qui ne se sont pas adaptés à cette nouvelle donne, et qui ne savent pas utiliser les réseaux sociaux efficacement pour sourcer. Sont-ils toujours utiles pour ces sujets précis aujourd’hui ?

Pour sortir des ornières intellectuelles dans lesquels beaucoup tombent facilement, il est nécessaire de distinguer transformation des métiers et remplacement des activités. Lorsque l’IA devient capable de prendre complètement à sa charge certaines activités d’un métier, cela ne signifie pas que le métier est remplacé. Mais cela signifie que le professionnel de ce métier doit intégrer cette avancée en conscience et en responsabilité, pour repenser la manière dont il crée de la valeur au quotidien. Parfois, il s’agira de s’unir avec la machine pour augmenter l’activité, parfois il s’agira de développer de nouvelles activités pour repenser le métier. 

Lorsque je poste sur ces sujets sur LinkedIn, il y a toujours quelques commentaires très virulents, m’expliquant que je suis le diable car j’aborde l’impact de la technologie dans les RH, et que cela signifie que je n’accorde aucune valeur à l’humain. En 2023, je pense qu’il est fondamental de comprendre que les technologies productives finissent par être adoptées, que l’on soit d’accord ou non. Après plusieurs décennies de transformations successives, je suis convaincu qu’on peut apprendre du passé, et surtout accepter d’anticiper plutôt que de faire l’autruche.

Faut-il s’assurer que l’on conserve l’humain au cœur des processus RH ? C’est indiscutable. Mais qui a dit qu’il fallait faire le contraire ? Transformer, ce n’est pas remplacer. Et transformer, c’est s’adapter, ce que je considère comme la meilleure preuve d’intelligence possible.

En 2023, comment identifier les métiers RH impactés par l’IA ?

Pour essayer d’y voir plus clair, nous avons utilisé GPT-4 lui-même pour mener une étude prospective sur le sujet. Plus précisément, nous avons demandé à l’IA de préciser les métiers RH pour lesquels GPT-4 serait capable de remplacer au moins 80% des activités, et d’indiquer l’horizon de temps auquel cela serait possible. La méthodologie complète est un peu trop longue pour cet article, mais nous la tenons à disposition sur demande. 

Pour faire court, nous avons recherché un Top 20 de ces métiers, dix fois de suite, obtenant ainsi 200 résultats pour 27 métiers RH différents. Puis nous avons recoupé ces données en demandant à GPT-4 d’analyser des fiches de poste françaises pour ces métiers, et de refaire les calculs. En parallèle, nous avons effectué nous-mêmes l’exercice à la main sur un métier, pour faire une analyse de cohérence, qui s’est avérée positive. Après un exercice de synthèse, nous avons finalement obtenu un Top 20 final, pour lequel nous estimons très robustes les 12 premiers résultats a minima.

Alors que certains pourront dire qu’une telle démarche est biaisée par défaut et que les résultats ne valent rien, je leur répondrai que des études très sérieuses, académiques et scientifiques nous ont expliqué il y près de 10 ans que la moitié des métiers allaient disparaître, et pourtant ce n’est pas le cas. Donc plutôt que de passer trois ans sur une étude qui porte les biais des chercheurs qui la mènent, et qui s’avère complètement fausse en fin de course, pourquoi ne pas tenter une expérience plus agile et réflexive, grâce aux capacités d’analyse et de classement des IA génératives ? Si nous avions dû faire le même exercice à la main, il nous aurait fallu plusieurs mois, et je suis loin d’être convaincu que l’analyse aurait donné des résultats plus précis.

Pourquoi cette approche est intéressante ? Parce que les études longues et minutieuses du passé nous montrent que personne ne possède de boules de cristal, pas même les plus grands chercheurs. Il est donc temps de passer aux études de fond du 21ème siècle, et cela signifie deux choses essentiellement :

  1. Il peut être intéressant d’utiliser les technologies actuelles pour réduire drastiquement le temps nécessaire de production des études de tendances.
  2. Une étude n’est pas la vérité, et elle doit avant tout servir à enclencher des discussions et des analyses spécifiques approfondies sur les sujets mis en avant par cette étude. Il faut la voir comme un tamis capable de dégrossir le sujet, ni plus ni moins.

Quels seront les métiers RH touchés par les IA ?

Assez de suspense, voici le résultat de notre étude 4.0. Tout d’abord, je rappelle qu’il est important de ne pas la considérer comme une source de vérité, mais comme un élément d’ouverture de la discussion, et un indice de ce qu’il peut être intéressant d’investiguer en matière de transformations des métiers RH. Dans le tableau qui suit, lorsqu’un métier est indiqué à 70% en 2030, cela signifie qu’il y a 70% de chances que 80% des tâches de ces métiers soient remplaçables par IA en 2030. Les chiffres sont indicatifs, et la réalité effective dépendra de deux facteurs majeurs non déterminés à ce jour : la vitesse de progression des technologies dans les 10 ans à venir, et la résistance aux changements des individus et des organisations. Mais ce n’est pas parce qu’on ne peut pas être exact qu’il ne faut rien entreprendre !

Ainsi, au terme de l’étude, on obtient un tableau intéressant des 20 métiers RH susceptibles d’être le plus transformés par le déploiement massif des IA. Sans grande surprise, on voit les métiers très administratifs concernés à relativement court terme. De manière plus surprenante, on trouve le métier de recruteur tout aussi impacté. De mon point de vue, il s’agit d’un bon exemple pour montrer que la transformation d’un métier n’implique pas sa disparition. Il y aura toujours besoin de recruteurs pour parler aux candidats, et présenter le visage humain de l’entreprise. Mais il est aussi vrai que le recruteur de 1990 n’est plus celui d’aujourd’hui, et encore moins celui de demain. Et c’est là l’approche que nous recherchons avec notre étude. Je vous laisse découvrir par vous-même le résultat de ce Top 20.

Dans le tableau, on remarque ainsi que certains métiers sont en première ligne, avec un risque important d’automatisation de plusieurs de leurs activités. C’est le cas des métiers d’assistant administratif RH, et de gestionnaire de paie par exemple, où il semble que près de 80% des tâches soient automatisables dès 2025. Cela ne signifie pas nécessairement que ces tâches seront vraiment automatisées, simplement que l’état de la technologie le permettra. Par exemple, dans la grande distribution, il est possible d’automatiser les activités des agents de caisse, et pourtant le métier n’a pas disparu. Il faut donc lire ce tableau pour ce qu’il est, un état probable de la technologie, et non pas un état du marché du travail. 

Il est important de rappeler que ces probabilités sont calculées à partir des activités décrites dans les fiches de poste, qui ont tendance à décrire les activités les plus courantes des métiers. Or, de nombreuses activités informelles des métiers consistent dans des interactions humaines complexes, un peu comme la discussion près de la machine à café pour apprendre que telle personne connait quelqu’un qui pourrait être intéressé pour rejoindre l’entreprise. Donc encore une fois, il ne faut pas s’alarmer de ce tableau, et plutôt s’en servir positivement pour comprendre comment faire évoluer les différents métiers concernés, car il y aura malgré tout des évolutions à prévoir.

Pour éviter de subir cette #transformation RH, il est important de la préparer dès maintenant, et en fait ce n’est pas si compliqué. En organisant la démarche sur une logique d’acceptabilité du changement, on peut commencer par créer des cercles de discussion sur les appréhensions technologiques. Ces discussions doivent permettre d’alimenter une étude prospective d’impact sur les métiers de la fonction RH, en même temps que des ateliers de sensibilisation et de prise en main des IA sont organisés. Ces trois éléments sont critiques pour permettre de vrais ateliers de refonte des métiers RH, pensés en conscience et en responsabilité. Et l’avantage, lorsqu’on l’a fait pour soi, c’est qu’on comprend mieux comment le faire dans le reste de l’organisation !

Parce qu’il s’agit de métiers comprenant de nombreuses tâches intellectuelles, il faut déjà partir du principe que tous les métiers RH verront une partie de leurs activités touchées par la démocratisation des IA génératives. Ces métiers vont-ils disparaître pour autant ? NON, probablement pas. Mais vont-ils se transformer en profondeur ? OUI, très probablement. 

La relation humaine peut et doit rester au cœur des processus RH en lien avec la gestion des talents. Mais si on ne la prépare pas, il ne s’agira que de belles pensées très éloignées de la réalité d’un marché où les codes productivistes finissent toujours par s’imposer. Et donc, pour mieux allier évolutions technologiques et nécessité d’humanisme, il faut anticiper, préparer, et accompagner. On peut refuser pour soi ces évolutions, il s’agit d’un choix personnel. Mais penser que son entreprise ou que la société en fera de même sur la durée, c’est simplement un déni qui peut coûter humainement et financièrement à terme. Les transformations que l’on ne prépare pas aujourd’hui sont probablement les plans sociaux de demain !

Crédit photo : Shutterstock / fizkes

Une tribune réalisée en partenariat avec le Lab RH



François Humblot2023-09-24 11:17:46
Article très pertinent sur l'évolution de nos métiers!
rebillard2023-04-07 17:04:38
Bonjour, l'article suscite beaucoup de questions de fond avec surtout en point de mire, comment s'adapter à l'IA en RH dés lors que nous sommes dans des structures un peu vieillissant et des des services dit d'ajustement . merci d'avance

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