Baromètre 2024 – Naviguer dans le chaos : les vertus de l’expérience collaborateur
Personne ne sait plus où va le navire, mais certains tiennent mieux la mer que d’autres. C’est le résumé de cette 7e édition du baromètre national de l’expérience collaborateur, réalisée par Parlons RH et Cornerstone. La conjonction des transformations – environnementales, technologiques, économiques, sociales, politiques – génère un niveau inédit d’incertitude et d’imprévisibilité pour les individus comme pour les organisations. L’avenir n’est pas cartographié, mais il y a bien des attitudes gagnantes pour naviguer dans le chaos. Et l’amélioration réflexive de l’expérience collaborateur en est une.
Pour la 7e fois depuis 2018, nous avons interrogé les entreprises françaises sur leurs pratiques RH en matière de mesure et d’amélioration de l’expérience collaborateur. Cette année, nous mettons l’accent sur la relation entre ces pratiques et les grandes transformations que nous affrontons collectivement.
Les principaux enseignements sont les suivants :
- Personne n’est épargné : les grandes transformations se font ressentir dans toutes les organisations ;
- Les entreprises qui ont mis en place une démarche d’expérience collaborateur (les « pratiquantes ») s’en sortent mieux que les autres (les « non-pratiquantes »), et anticipent davantage ;
- La pratique de l’expérience collaborateur relève de plus en plus des actes et de moins en moins de la seule posture ;
- La sphère RH est désormais largement acquise à la cause.
L’impact RH profond des grandes transformations
Les organisations sont le jeu de courants puissants et souvent contradictoires : innovations technologiques, crise environnementale, mutation des marchés, pénurie de talents, nouvelles attentes des salariés et des candidats. Dans 94 % des entreprises, au moins un métier-clé est affecté par l’une de ces transformations – le plus souvent, par plusieurs d’entre elles.
Certes, les salariés se préoccupent d’abord de sujets internes à l’entreprise : organisation du travail, qualité de vie au travail, pouvoir d’achat. Mais ils s’inquiètent aussi souvent de l’impact de l’IA, du digital et du réchauffement climatique.
Un vent général de changement souffle donc sur les organisations françaises. Et ce, qu’elles soient pratiquantes ou non de l’expérience collaborateur : à quelques nuances près, les résultats sont les mêmes pour tous. Les contrastes que nous allons évoquer ne sont donc pas le reflet d’un niveau d’exposition différent aux grandes transformations.
L’expérience collaborateur rend les entreprises résilientes et proactives
C’est en effet dans l’action que la différence entre organisations pratiquantes et non pratiquantes se fait le plus sentir.
Les premières sont d’abord mieux préparées. Les pratiquantes confirmées ont pris dès les années post-Covid des mesures en matière de GPEC (pour 77 % d’entre elles) ou de gestion individuelle des parcours (72 %), contre respectivement 33 % et 29 % des entreprises que nous appelons « réfractaires » .
Mais les pratiquantes, surtout, sont beaucoup plus nombreuses à passer à l’action aujourd’hui, que ce soit dans le domaine des RH ou dans celui de l’organisation de la production.
Cette différence d’adaptation dissimule un rapport à l’avenir très différent : la quasi-totalité des pratiquantes confirmées sont optimistes quant à leur faculté à s’adapter aux changements, contre seulement 40 % des réfractaires. L’expérience collaborateur est donc fortement corrélée à une plus grande résilience, une plus grande propension à agir et une plus grande confiance en l’avenir.
Derrière l’expression « expérience collaborateur », des pratiques RH plus matures
Tout le monde ne donne pas le même sens à l’expression « expérience collaborateur » : nous l’avons souvent constaté dans les éditions précédentes. Pour certains, le simple fait de se préoccuper du ressenti des salariés, même de façon informelle, permettait de se revendiquer d’une démarche d’expérience collaborateur. Pour d’autres, prendre la température du climat social était suffisant. Ces nuances de perception existent toujours, mais elles perdent du terrain.
Aujourd’hui, 75 % des entreprises pratiquantes ont bel et bien mis en place un processus d’amélioration des services RH et/ou de l’organisation du travail en réponse aux retours des salariés. Et la part des professionnels RH qui comprennent l’expérience collaborateur dans ce sens précis a considérablement progressé, pour devenir nettement majoritaire.
En revanche, le sous-équipement en outils digitaux de suivi de l’expérience collaborateur, que nous signalons depuis plusieurs années, reste marqué. Or, la vitesse à laquelle nos organisations et leur environnement se transforment rend de plus en plus nécessaire une réactivité accrue que seules des solutions digitales pertinentes et bien utilisées peuvent nous apporter.
Mais globalement, ne boudons pas notre plaisir : l’expérience collaborateur, telle qu’on la pratique, se renforce et progresse !
Tout ce qui brille n’est pas expérience collaborateur
Question subsidiaire, cependant : les ¾ des pratiquantes ont une approche pertinente de l’expérience collaborateur, mais qu’en est-il du quart restant ? Et qu’en est-il des pratiques RH des « non-pratiquantes » de l’expérience collaborateur ? En regardant de près, l’enquête révèle un certain nombre de « faux négatifs » et de « faux positifs ».
Jetons un œil aux « faux positifs » – les pratiquants déclarés qui n’en sont pas. La quasi-totalité des organisations pratiquantes ont bien mis en place des dispositifs d’écoute des salariés ou de mesure du bien-être au travail. Mais 14 % d’entre elles ne déploient aucun processus formel d’amélioration de l’expérience collaborateur. On vous écoute, on compatit mais… on ne fera rien..
Les « faux négatifs » à présent. Il s’agit d’entreprises qui affirment ne pas avoir déployé de démarche d’expérience collaborateur, mais qui ont mis en place des processus qui y ressemblent furieusement : elles écoutent leurs salariés, et déploient en retour des actions pour améliorer les services RH et/ou l’organisation opérationnelle du travail. 43 % des non-pratiquantes sont dans ce cas ! Bien sûr, une partie d’entre elles se contentent probablement d’actions limitées et ponctuelles, sans s’inscrire dans un processus systématique. Mais tout de même, 43 % !
Les DRH à la manœuvre
La sphère RH est unanime sur l’utilité de l’expérience collaborateur, dans les entreprises pratiquantes comme dans les non-pratiquantes. Et 87 % des professionnels RH interrogés, toutes entreprises confondues, jugent même qu’une telle démarche est indispensable pour faire face aux grandes transformations.
La pratique de l’expérience collaborateur s’est par ailleurs stabilisée en 2024, au haut niveau qu’elle avait atteint en 2023. Mais ce palier va de pair, on l’a vu, avec un renforcement des convictions de la sphère RH et une amélioration qualitative des pratiques. Un bilan dont les DRH peuvent être fiers : dans 81 % des entreprises pratiquantes, ils sont les pilotes de l’expérience collaborateur.
L’heure n’est cependant pas au satisfecit ! Il reste beaucoup à faire, et ce sera toujours le cas : les grands mouvements de transformation qui vont modeler notre avenir ne nous laisseront pas de repos. Et les politiques d’expérience collaborateur servent précisément à ça : elles maintiennent les organisations éveillées et actives, en faisant vivre l’échange continu entre les instances dirigeantes et les femmes et les hommes qui composent l’entreprise. Si cette dynamique se grippe, attention danger !