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Les vertus acquises du courage managérial

le 09 janvier 2025
Les vertus acquises du courage managérial
Christophe Mansuy
Christophe Mansuy

DRH du groupe Colas, spécialiste de la construction et de l’entretien des infrastructures de transport.

Le management, ça se cultive, comprend-on en écoutant Christophe Mansuy. Pour le DRH du groupe Colas, spécialiste de la construction et de l’entretien des infrastructures de transport, une formation méthodique, agile et continue des managers est la clé.

« J’ai toujours aimé les sujets RH, et j’ai beaucoup de plaisir à exercer cette fonction », affirme Christophe Mansuy, devenu DRH pour la première fois il y a un peu plus d’un an. Initialement ingénieur d’études à l’Institut français du pétrole (Axens) en 1989, cet ancien de l’école des Mines de Nancy a poursuivi une carrière dans des fonctions opérationnelles et managériales à l’international, en particulier dans le secteur de l’énergie (Bouygues Offshore). Il rejoint Colas en 2016. PDG de la filiale SPAC, puis DG international de Colas Rail, il assume depuis 2023 la fonction de DRH groupe.

MANAGER, UN SPORT DE TERRAIN

« Comme toutes les fonctions support, nous travaillons en coordination et pour le bénéfice des entités opérationnelles. Nous sommes au service de nos collègues qui sont face aux clients. » Une approche particulièrement importante, selon Christophe Mansuy, dans un groupe comme Colas dont l’activité repose sur des « métiers de proximité, où la qualité des collaborateurs est l’actif le plus précieux pour assurer réussite et croissance ».

Pour Christophe Mansuy, la culture managériale se conçoit au plus près du terrain, là où « se gagne le résultat d’une entreprise. Nous devons répondre aux attentes de nos équipes, leur apporter des solutions pertinentes. Nous concevons et construisons des solutions de mobilité et de transport durable et responsable : c’est concret, pratique, tangible. Nous ne sommes pas dans un management abstrait ». Aussi Christophe Mansuy se rend-il sur le terrain une semaine sur deux. « Cela fait partie de l’ADN du groupe : les dirigeants et managers doivent être visibles et accessibles. » 

PORTRAIT-ROBOT DU « MANAGER IDÉAL »

Pour le DRH de Colas, la culture managériale est avant tout une expression de la culture d’entreprise. Le manager doit avant tout faire preuve de « courage managérial », en parlant vrai, en soignant un feed-back sincère, continu et constructif, et en « incarnant les valeurs du groupe ». Des valeurs (respect, audace, partage) associées aux 8 piliers RSE du projet ACT, promu par Christophe Mansuy et dont 3 relèvent directement des RH et du management : « Attirer, développer et fidéliser les talents par l’excellence managériale », « Consolider une culture santé sécurité pour protéger » et « Consolider une culture exemplaire de l’éthique et de la conformité ».

Comment aide-t-on concrètement les managers à réaliser ce programme ? « Nous avons développé une définition-type du manager idéal. Nous sommes partis de nos 3 valeurs fondamentales que sont le respect, le partage et l’audace. Pour chacune de ces valeurs, nous avons identifié 3 comportements ou compétences-clés à maîtriser pour les managers, et nous avons développé les formations correspondantes. » Posture managériale, culture de la performance, relation avec les parties prenantes… Les managers peuvent ainsi progresser en suivant des formations « à tiroirs » et adaptées. L’université interne du groupe propose en complément sur tous ces thèmes une grande variété de contenus en ligne sous différents formats.

La fonction RH assume ici « un rôle de moteur et de garant du tempo », et contribue à l’amélioration continue de la culture managériale. Elle veille également à ce que le feed-back ait lieu dans les deux sens. « Nous avons mis en place une enquête annuelle pour prendre le pouls de nos équipes, avec un taux de participation de 80 %, et un excellent taux d’engagement de 83 %. » Le dispositif « permet des analyses par fonction et par zone géographique dont les managers locaux peuvent se servir pour identifier des écarts par rapport à la norme. Ils peuvent ensuite mettre en place des plans d’actions pour progresser ». La démarche, qui cible les 65 000 collaborateurs du groupe, a conquis en 4 ans l’ensemble des managers, pas tous convaincus au départ.

UNE CULTURE MANAGÉRIALE AU PLURIEL

Mais comment fonctionne la culture managériale d’un groupe international implanté dans 50 pays et travaillant dans une trentaine de langues différentes ? « Nous opérons de façon très décentralisée. Il y a des principes communs, mais les managers locaux sont les mieux placés pour prendre les décisions opérationnelles. » Le terrain, toujours. Les filiales s’inscrivent elles-mêmes dans des pays aux cultures distinctes. « Dans le monde anglo-saxon, la culture du feed-back est intégrée à l’éducation. Elle se déploie facilement dans l’entreprise, de façon naturelle, sans affect négatif. D’autres cultures reposent davantage sur le collectif, et renforcent le talent des managers à s’entourer de personnes compétentes pour atteindre leurs objectifs. »

Le monde est pluriel, et le management aussi. « Pour les managers appelés à devenir les leaders de demain, il est important de comprendre qu’il existe de nombreux modèles et que chacun recèle ses propres vérités. Et pour cela, il faut se confronter à des environnements culturels, sectoriels, sociaux, économiques différents. »

TRANSPARENCE, DIVERSITÉ ET COMPLEXITÉ : DES TENDANCES DE FOND

Mais au-delà de cette diversité des cultures, certaines lames de fond déferlent sur toutes les organisations du monde. « L’instantanéité des modes de communication conduit les cultures managériales à converger vers davantage de transparence. Dans un groupe international comme Colas, cela suppose notamment un accès global de tous à l’ensemble des opportunités de carrière dans les 50 pays d’implantation. » Mais la transparence affecte également les rémunérations, et leur relation avec la performance. La culture du secret qui entoure encore ce sujet dans beaucoup de pays, dont la France, va être amenée à reculer.

Autres mouvements de fond : « l’abandon d’un modèle de leadership au masculin, et la neutralité en matière de genre sur un nombre croissant de sujets. » Mais aussi, « la relation entre âge et responsabilité ne sera plus la même. Dans certains secteurs, on rencontre des CEO d’entreprises internationales qui ont 25 ans ». Les profils des managers, inéluctablement, sont amenés à se diversifier.

La culture managériale des organisations se transforme donc, et à grande vitesse. Pour le manager, l’adaptation n’est pas toujours facile. Christophe Mansuy a sa méthode pour faire face : « quand la complexité nous submerge, il faut revenir 1) à nos valeurs personnelles et 2) aux valeurs de l’entreprise. C’est l’alignement des deux qui va guider nos choix dans les moments difficiles. »

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Crédit photo : Christophe Boulze



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