interviews

Mobiliser l’interne pour mieux recruter

le 12 avril 2021
Olivier Destefanis
  • Lieutenant-colonel, adjoint au chef du bureau marketing du recrutement et responsable Marque employeur et influence
  • Précédemment responsable d’un pôle de communication d’influence et gérant d’une agence de communication de crise
  • Diplômé de IHEDN, NatoSchool et Inform Lille

Pour relever le défi de recruter 16 000 soldats par an, l’armée de Terre déploie de nombreuses actions de marketing de recrutement dont un programme d’employee advocacy. Nous avons souhaité échanger avec Olivier Destefanis, responsable de la marque employeur de cette institution pour connaître quels sont les objectifs et les attentes des recruteurs en kaki sur ce sujet.

 

Pourquoi faire appel aux collaborateurs pour mieux recruter ?

À l’origine, il y a un constat et une conviction. Le constat que nous avons fait, c’est que nos candidats au recrutement multiplient leurs sources d’informations et qu’ils vont vérifier nos messages auprès de différents interlocuteurs. Ils ont d’ailleurs une certaine défiance vis-à-vis du discours institutionnel. En revanche, ils ont plus confiance dès qu’ils perçoivent un discours moins formalisé. Nous avions aussi la conviction que celui qui parle le mieux d’un métier est celui qui le pratique au quotidien. C’est pourquoi nous avons proposé à des soldats de nous aider à mieux faire découvrir aux jeunes leur quotidien, leur spécialité. Un appel à volontariat a été lancé et très rapidement nous avons lancé notre programme d’employee advocacy et c’est aujourd’hui un élément important de notre marque employeur.

 

Quels types de programmes avez-vous lancés ?

Nous avons déployé deux plateformes. La première, fin 2019, est conversationnelle. Depuis leur régiment, voire en opération, nos soldats répondent par écrit à des questions posées par des jeunes ou leurs proches. Tous les sujets de la vie quotidienne des soldats sont abordés par les internautes. Nous laissons une grande liberté à nos ambassadeurs pour formuler des réponses en toute transparence. Et nous venons récemment d’offrir la possibilité à des étudiants de venir échanger soit en visioconférence, soit par téléphone avec des cadres ambassadeurs via une seconde plateforme. Ces rendez-vous durent de 20 à 40 minutes environ. Nous avons fait l’effort de montrer aux étudiants que s’ils souhaitent prendre des responsabilités après leurs études, ils peuvent le faire, quelle que soit la spécialité acquise. Nos deux plateformes illustrent parfaitement l’extraordinaire diversité des parcours au sein de l’armée de Terre et la richesse de la ressource humaine de cette institution.

 

Quelles ont été les difficultés rencontrées pour lancer ces programmes ?

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que ces plateformes d’ambassadeurs du recrutement sont des réseaux sociaux avec une particularité importante. En effet, sur les plateformes d’employee advocacy vous devez animer deux communautés, lorsque sur un réseau social classique vous n’en animez qu’une. Il faut prévoir autant de temps et d’énergie pour inciter votre public cible à venir rencontrer vos ambassadeurs que pour motiver et guider ces derniers. Bien souvent, on appréhende mal cet effort qui est double. Enfin, il faut aussi accepter de laisser une certaine liberté de parole à nos ambassadeurs. Il faut donc faire confiance et consentir une part de risque. Ensuite, nos ambassadeurs sont tous opérationnels en régiment. Il faut donc bien gérer leur disponibilité et bien faire comprendre aux candidats que la réponse ne peut pas être instantanée car ils parlent à des professionnels qui ne sont pas des recruteurs à temps plein.

 

Quel premier bilan tirez-vous de ces dispositifs ?

La performance pour notre plateforme conversationnelle est au rendez-vous après un an d’existence. Elle génère un trafic important avec 135 000 visiteurs uniques. Ce sont environ 5 000 réponses qui ont été apportées par nos ambassadeurs aux interrogations des jeunes. Les discussions sont publiées sur la plateforme et les visiteurs peuvent toutes les lire. En moyenne, ce sont 130 vues par discussion et la plus performante compte 13 620 vues. Notre activité sur ce média est en constante progression. Sur la plateforme à destination des étudiants, bien que toute récente, nos ambassadeurs sont très sollicités et le taux moyen de rendez-vous par mois est de 4. Au-delà de ces résultats probants, ce programme d’employee advocacy a généré une excellente dynamique interne autour du recrutement. Nous envisageons d’ailleurs pour renforcer notre marque employeur de proposer un dispositif plus large qui permettrait d’impliquer chaque militaire qui le souhaite.

 

Quels conseils donneriez-vous à une entreprise ou une institution qui souhaitent se lancer dans un programme d’employee advocacy ?

Je donnerais trois conseils. Primo, il est indispensable, comme pour toutes actions de communication ou de marketing de recrutement, de se fixer des objectifs clairs avant de se lancer dans la réalisation. Cela permettra de choisir un dispositif adapté à ses propres besoins, sans forcément copier celui d’une autre institution. Secundo, il faut s’assurer que l’on dispose bien des ressources humaines suffisantes, qualitativement et quantitativement, pour bien gérer les dispositifs. La formation des ambassadeurs et l’appui à leurs actions sont très chronophages. Il faut s’assurer que les sollicitations des candidats trouvent toujours une réponse. Un candidat qui n’en reçoit pas sera déçu et se sentira déconsidéré. Cela impactera notre image de marque. Enfin, je conseille de ne pas hésiter à se renseigner auprès de ceux qui ont déjà lancé des programmes similaires. C’est une source d’informations très fiable. D’ailleurs, je suis à la disposition de vos lecteurs, s’ils souhaitent échanger sur nos programmes, ils seront les bienvenus.

Crédit photo : Shutterstock / Johnstocker Production


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