Parlez marque et vos interlocuteurs penseront spontanément marque corporate ou commerciale [1], en les associant à la création de valeur. Pourtant, la marque s’attache également au capital humain afin d’accompagner ses forces vives et d’attirer les talents : c’est la marque employeur. Dans un contexte de porosité des pratiques, faut-il manager la marque de façon distincte selon les cibles qu’elle vise et ses objectifs, ou la penser en synergie au service de l’intérêt stratégique de l’entreprise ?
Sommaire
Au commencement, la marque n’existe pas. Ou du moins, les entreprises commercialisant une gamme de produits ne capitalisent pas sur leur notoriété en tant que groupe. Leur nom se confond alors avec leur dénomination sociale, méconnue du grand public. L’exemple français le plus emblématique est celui de BSN, devenu Danone en 1994 et ainsi, marque corporate. Cette évolution vise à faire bénéficier chaque produit de la notoriété et de l’image de la marque [2], tout en agissant en synergie en termes de marketing et de communication. Plusieurs positionnements s’offrent à la marque corporate, de la marque gamme à la marque ombrelle ou encore la marque caution.
Certains grands groupes décident néanmoins de capitaliser sur des marques produits : c’est le cas du géant américain Protect & Gamble, qui commercialise plusieurs lessives très connues en misant sur des arguments de vente distincts – meilleur rapport qualité/prix, seule lessive pour le lavage à la main et en machine, etc. Le groupe se prémunit ainsi du phénomène de contagion en cas de bad buzz sur l’un de ses produits.
Plus récemment, la marque s’est développée dans sa dimension Ressources Humaines.
Apparu en France à la fin des années 90, le concept de marque employeur a été largement diffusé depuis. Il s’agit de « mettre en cohérence l’ensemble des expressions employeur de l’entreprise, internes et externes, au nom de sa performance économique ».
La marque employeur concerne toutes les parties prenantes de l’organisation, des salariés ou managers aux pouvoirs publics et aux médias en passant par les candidats, voire les clients. Elle se construit :
Des travaux universitaires ont clairement montré que la marque employeur se nourrit de la marque corporate [5]. Mais quels sont ses objectifs ?
La marque employeur permet tout d’abord de partager une image cohérente avec le projet, la mission, les valeurs de l’entreprise. Renforçant la réputation de cette dernière, elle favorise son attractivité.
On perçoit à ce stade la contribution de la marque employeur à la création globale de valeur.
Pour obtenir de tels résultats, un diagnostic doit avoir été effectué au préalable dans l’entreprise ainsi qu’un audit d’e-réputation employeur.
Ici, le client. Là, le collaborateur. D’une part, le candidat. De l’autre, les partenaires de l’entreprise. Etc.
Si la gestion de la marque a souvent segmenté les publics, à l’ère digitale elle se heurte à leur porosité due notamment à la multiplication des canaux d’acquisition — côté clientèle -, de communication côté collaborateurs, candidats, influenceurs entre autres.
Tantôt client, tantôt candidat, tantôt collaborateur, la cible échappe à une approche trop morcelée de la marque. Et son comportement de consommateur influence son attitude professionnelle : habitué à satisfaire son désir d’achat, le collaborateur de 2019 tolère mal la frustration d’une promesse employeur [6] non remplie ou seulement en partie.
La même porosité est à l’œuvre lors d’une phase de recrutement.
En parallèle, la prise de parole relative à la marque n’est plus l’exclusivité de la communication corporate. La voix des collaborateurs bénéficie même d’une crédibilité supérieure à celle de l’organisation, comme en témoigne la consultation des sites de notation d’entreprises avant de postuler à une offre d’emploi (Glassdoor, choosemycompany). Selon l’enquête HelloWork, 82 % des candidats effectuent des recherches préalables.
Comment répondre à ces attentes et s’adapter à l’évolution des comportements, en interne et à l’externe, de l’étape du sourcing jusqu’au départ du collaborateur ?
Les « fonctions » de la marque employeur viennent renforcer celles de la marque.
Pour que ce principe actif produise ses effets, la formalisation d’une plateforme de marque employeur (reprenant le schéma de la plateforme de marque en l’adaptant à la dimension employeur) est indispensable. C’est elle qui va structurer les messages transmis aux différents publics de l’entreprise.
Les différentes déclinaisons de la marque doivent s’articuler pour se mettre au service de la stratégie globale de l’entreprise. Il s’agit par exemple de réévaluer les budgets dédiés au management de la marque employeur. Perçue comme la cerise sur le gâteau par de nombreuses organisations, les budgets qui lui échoient sont souvent restreints. Dès lors, comment porter une ambition humaine forte ? Il ne suffit pas d’acheter un baby-foot pour nourrir sa marque employeur !
Or, pour relever le défi majeur de l’entreprise en 2019 — celui de la confiance à instaurer ou restaurer avec ses différentes parties prenantes -, la marque employeur offre des leviers efficaces.
Un exemple avec la grande distribution et le groupe Casino. Sous la houlette de l’ancien DRH du groupe, Yves Desjacques, et du Dr Philippe Rodet, un programme de formation au management bienveillant est progressivement déployé auprès de l’ensemble des lignes managériales. À la clé pour le groupe Casino : le Prix de la créativité RH de l’ACCE (Agences Conseil en Communication pour l’Emploi) et le qualificatif de leader RH de la grande distribution.
On pourrait objecter qu’une marque employeur altérée, comme celle d’Amazon, n’affecte ni ses performances commerciales ni son recrutement. C’est vrai. Faut-il rappeler qu’Amazon a profondément disrupté le marché et que le groupe n’a à ce jour aucun concurrent direct ?
Par ailleurs, certains talents s’engagent dans ce groupe par goût de l’aventure pour évoluer au sein d’un modèle novateur, malgré les errements managériaux dont chacun a conscience. Quid de cette attractivité dans quelques années ?
Si la réputation et les hommes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise, ce sont bien deux facteurs décisifs de compétitivité et de pérennité pour les organisations comme le pensait Henry Ford. Or la marque employeur optimise les deux.
Aujourd’hui, la marque employeur est indissociable de l’identité corporate de l’entreprise. Mettant en lumière son offre RH de façon stratégique, elle doit traduire l’ambition de sa gouvernance à l’égard du capital humain. La marque « globale » pourra ainsi sceller un pacte informel avec l’ensemble de ses parties prenantes – informel ne signifiant pas volatil, quand l’authenticité est au rendez-vous.
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