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Recrutement et expérience candidat : comment dépasser le CV grâce aux compétences

En pleine guerre des talents, rénover le processus de recrutement est un véritable challenge pour les entreprises. Plutôt que de se baser sur le CV, qui ne reflète pas les réelles aptitudes des candidats, elles gagneraient à recruter d’une manière plus simple et objective : en identifiant et en évaluant les soft skills et les hard skills lors de tests et de mises en situation.

Le process de recrutement n’évolue guère en 2022, alors que nous assistons à un changement de paradigme. Le travail hybride et le « remote » rebattent les cartes. L’expérience candidat, la diversité et l’inclusion, et la montée des soft skills deviennent des enjeux de taille. Nous basculons actuellement d’une économie de la qualification vers une économie de la compétence. Les reconversions sont de plus en plus nombreuses, notamment suite à la crise du Covid-19. Et nous passons d’un monde de CV et de diplômes, avec des carrières linéaires, à un monde où les nouvelles générations occuperont en moyenne, à partir de leur sortie de l’école jusqu’à la retraite, 17 emplois différents et cinq carrières différentes.

Tout doit désormais se construire autour des compétences, que l’on devra, de plus en plus, apprendre et renouveler. Certaines entreprises, comme Bosch (1), investissent déjà massivement dans le reskilling (requalification), qui consiste à former en continu les salariés sur des nouvelles compétences pour rester en accord avec les évolutions du marché et de la technologie. Sachant que 85 % des emplois de 2030 n’existent pas encore, il y a urgence à repenser les compétences des employés, et à privilégier l’adaptabilité et la capacité d’apprentissage plutôt que les hard skills.

Malgré tous ces enjeux, le recrutement continue de démarrer par une étape laborieuse et datée : l’envoi d’un CV et d’une lettre de motivation, via un site carrière. En matière d’expérience candidat, outre le fait que cela dénote à l’heure de l’instantanéité des réseaux sociaux, ce process s’avère extrêmement discriminant.  On sait via diverses études que certains candidats n’hésitent pas à enjoliver leurs expériences passées et compétences. Sans parler des biais humains, qui poussent certains recruteurs à écarter des candidatures en se basant sur les noms de famille des postulants. 

En outre, la fin du process de recrutement demeure très peu transparente, sans véritable feed-back à destination des personnes non retenues. Trop de candidatures restent aussi lettre morte, quand 65 % des candidats déclarent “moins aimer une société” après y avoir postulé et n’avoir pas reçu de réponse (étude Career Builder, 2018). 68% des travailleurs pensent que l’expérience candidat reflète la façon dont les entreprises traitent leurs salariés et 78% parlent à leur entourage de leur mauvaise expérience lors d’un entretien. Une situation extrêmement problématique, qui illustre combien la qualité de l’expérience candidat pèse sur la réputation de l’entreprise.

Miser sur les compétences plutôt que sur les qualifications

Dans un contexte où les recrutements sont de plus en plus souvent en tension, les entreprises se doivent de se démarquer pour attirer les meilleurs profils. Pour cela, elles ne peuvent plus faire l’économie de peaufiner leur expérience candidat, qui consiste à faire en sorte que les recrues perçoivent le process de recrutement comme agréable, transparent, juste et égalitaire. Pour la rendre meilleure, en finir avec le CV lors de la phase de candidature peut être un levier décisif. Ne plus recruter à partir d’un document listant des expériences et un cursus permet de démultiplier le nombre de candidatures : tout le monde peut avoir sa chance, pour peu que l’on mise sur l’évaluation des compétences.

L’alternative au CV peut ainsi être de rendre les candidats acteurs, et d’évaluer leurs compétences en les testant, en présentiel mais aussi en ligne. Il peut s’agir de tests de personnalité, de tests de capacités cognitives, de tests de langue, de tests de compétences métier, ou de tests de soft skills (2). En outre, la possibilité de comprendre ce qui compte vraiment pour l’entreprise en termes de compétences, puis d’obtenir facilement (et rapidement) un véritable feed-back de la part du recruteur, enrichit considérablement l’expérience candidat. 

Ces prochaines années, l’expérience candidat sera de plus en plus dématérialisée, mais elle doit avant tout rester humaine, engageante et transparente. Dans notre monde digital, les entreprises ont tout intérêt à attirer et intéresser les candidats, avec des informations, des vidéos et des photos incarnées, permettant de visualiser avec qui ils pourraient être amenés à travailler demain. C’est quelque chose que nous voyons encore peu dans les process de recrutement actuels, mais qui peut être facilité par des interfaces digitales dédiées à la fois à l’évaluation des compétences et à la mise en relation directe avec l’employeur. Il s’agit ainsi d’instaurer, dès la phase de candidature, une relation plus égalitaire et chaleureuse recruteur-candidat, loin du simple envoi de CV. 

Dépasser le CV est un enjeu de taille pour les entreprises. Elles ont tout intérêt à investir dans des outils digitaux RH qualitatifs, à développer d’urgence de nouvelles méthodes d’évaluation des compétences, et à mieux analyser le taux de satisfaction des candidats. Il s’agit de la clé qui leur permettra d’améliorer l’expérience candidat, tout en recrutant sur des compétences et des aptitudes réelles, plutôt que déduites d’un document papier. In fine, en améliorant ainsi le recrutement, elles gagneront des employés plus engagés, et donc plus performants.

(1) En février 2022, Bosch a investi 2 milliards d’euros pour “reconvertir” ses salariés, tandis que l’industrie automobile passe à l’électrique.

(2) Selon le principe de l’assessment, il est possible d’évaluer tout autant les hard skills que les soft skills, notamment à travers des tests de personnalité ou d’aptitudes cognitives, des mises en situation, ou encore des jeux.

Crédit photo : Shutterstock / GaudiLab

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