La marque employeur est à la mode. Est-ce une tare que d’être à la mode ? Nous sommes très fiers chez Parlons RH d’y contribuer. Mais le concept est aussi ancien. Le terme « marque employeur » a été évoqué pour la première fois par Ambler et Barrow en 1996. En France, le concept de marque employeur a été déposé par Didier Pitelet en 1998, il y a plus de 20 ans. La marque est donc vintage, à la fois à la mode et ancienne. Je crois qu’elle est surtout moderne, c’est-à-dire ancrée dans le temps présent des DRH et des entreprises, elle résonne avec le monde contemporain, avec les attentes des candidats et des collaborateurs, elle est à la fois un agent de cohérence dynamique et un ciment solide de l’identité employeur. Vous trouverez ci-dessous retranscrit le propos que j’ai pu tenir lors de ma Keynote d’ouverture à l’événement Human DAY au Palais des Congrès de Lille le 19 octobre dernier.
Sommaire
Heureusement pas la guerre militaire, en tout cas pas en France, mais la guerre économique !
Et ce n’est pas nouveau, car le concept de guerre économique a été créé en 1971, ça ne nous rajeunit pas, par Bernard Esambert et popularisé par Christian Harbulot au début des années 1990, il y a donc presque trente ans.
Depuis 30 ans, cette guerre s’intensifie.
Dans un monde de plus en plus incertain, les tensions économiques s’accroissent.
Les exemples ne manquent pas. La guerre économique est généralisée. Elle est intrinsèque à l’économie de marché dans laquelle nous sommes.
Il y a en parallèle de cette guerre et de cet accroissement de l’incertitude et de l’ampleur des tensions économiques qui vont avec, une tertiarisation de l’économie. Savez-vous combien de Français travaillent dans le tertiaire aujourd’hui ? Plus de 75 % (sur les 26 millions de Français dits « actifs occupés »). La part de l’agriculture dans la valeur ajoutée totale est ainsi passée de 18% en 1949 à 10% au début des années 1960 ; elle oscille aujourd’hui entre 1,5 et 2%.
J’évoquais en introduction la guerre économique, mais avec la tertiarisation de l’économie on pourrait parler de véritable rupture économique. Nous sommes rentrés dans l’ère de l’innovation, de l’économie de la compétence, de la « skills economy ». Ce qui va faire (ou qui fait déjà) la différence d’une entreprise à l’autre, le critère de son succès, c’est l’Homme. De son intelligence, de son aptitude à innover, de son capital émotionnel, dépend le devenir de nos organisations, de vos organisations.
Dans ce contexte de guerre économique et de nouvelle approche du travail, développer ce capital humain, le faire fructifier et le valoriser, devient –enfin !– stratégique pour l’entreprise et bien évidemment pour vous, professionnels des ressources humaines qui en avez la charge.
Nous sommes aussi confrontés à une autre guerre que vous connaissez bien : la guerre des talents.
Le marché de l’emploi est particulièrement paradoxal en France : nous connaissons un chômage de masse, 8,7% de la population active, et « en même temps » les entreprises qui embauchent n’ont jamais été si nombreuses à se plaindre de difficultés à recruter.
Selon la dernière enquête des « Besoins de main-d’œuvre » de Pôle emploi, la majorité des employeurs (50,1%) ont des difficultés de recrutement, contre 44,4% en 2018. En 2019, c’était déjà sept points de plus que l’année précédente. La tendance est à l’accroissement des difficultés d’embauche.
Les chiffres de Manpower pour le monde entier concordent : 45% d’entreprises se plaignent d’avoir du mal à recruter. Ce qui me semble encore plus intéressant c’est que c’est le plus haut niveau depuis que l’enquête Manpower existe, c’est-à-dire depuis 13 ans (2006).
Les problèmes d’attractivité ne font donc que commencer.
Dans la guerre des talents, cette difficulté à recruter n’est que la partie émergée de l’iceberg. L’enjeu n’est pas juste d’attirer, il est aussi de retenir. En France, le taux de turn-over se situe aux alentours de 16%, soit près du double de ce qu’il était il y a 20 ans.
A-t-on pour autant doublé les moyens de mettre sous contrôle ce taux de turn-over ?
De manière un peu péremptoire, je vous pose d’ailleurs ces questions sur le sujet :
J’ajouterai que plus du tiers des CDI (36,1%) conclus une année donnée s’achèvent au bout de moins d’un an, selon une étude de la DARES sur 50 000 établissements Français.
Le modèle RH de nos entreprises, qui est sans doute le fruit d’un modèle taylorien et fordiste, ressemble de plus en plus à celui du tonneau des Danaïdes. L’eau du bain des talents se vide aussi vite qu’il se remplit… Finalement, les équipes RH administrent de plus en plus un flux d’entrées et de sorties et valorisent de moins en moins un stock de talents. On pourrait résumer l’équation par les acronymes CV + STC vs VRAIE GPEC.
Problème de recrutement, de fidélisation, mais aussi d’engagement des collaborateurs. C’est la 3ème dimension de cette guerre des talents. Cet enjeu de l’engagement peut se décliner sommairement en deux axes : l’absentéisme moral et l’absentéisme.
Avoir une chance de remporter cette bataille des talents implique d’avoir conscience :
L’attractivité, la fidélisation et l’engagement doivent devenir des combats. Pour les gagner, il faut aussi gagner une 3e guerre, celle de l’attention.
Il s’agit en effet :
Le problème est très simple. Quel est-il ?
Il ne suffit pas de vouloir capter l’attention de ses cibles RH pour y parvenir tant elles sont sollicitées par ailleurs. Avant d’être un candidat ou un collaborateur, toute personne, vous et moi, est aussi un consommateur en puissance dont les marques et les médias s’efforcent de capter le célèbre « temps de cerveau disponible ».
J’ai trouvé sur Twitter un post qui illustre bien que le monde a changé. Sébastien nous dit :
Le monde s’est transformé. La fonction RH doit prendre en compte ce changement de paradigme de l’échange si elle souhaite remplir sa mission. Si elle veut être transformatrice, elle doit aussi se transformer.
Nous avons tous désormais accès à une quantité d’informations pertinentes bien supérieure aux capacités attentionnelles dont nous disposons pour en prendre connaissance. Il convient donc de mettre au premier plan une nouvelle rareté et sans doute une nouvelle source de valeur : l’attention.
Comprenons-nous bien : il ne s’agit pas, dans le domaine des ressources humaines, de capter et de manipuler cette disponibilité cérébrale et souvent émotionnelle : le service RH n’est pas et ne sera jamais une régie publicitaire.
Il est néanmoins indispensable d’appréhender cette nouvelle donne, pour intéresser son audience, pour en être entendu et pour construire avec elle une relation sur le long terme.
La marque employeur c’est un peu l’âme de l’entreprise. Et une entreprise qui n’a pas d’âme c’est une entreprise qui n’a pas d’armes dans ce contexte belliqueux précédemment décrit.
La marque employeur, c’est votre super pouvoir, celui qui adresse en cascade la guerre de l’attention, la guerre des talents et la guerre économique.
C’est la marque appliquée aux RH. C’est-à-dire l’ensemble des caractéristiques, des attributs, des signes distinctifs de l’entreprise dans ses dimensions Employeur.
L’entreprise ne fait pas que recruter, sinon on parlerait de marque recruteur, elle insère, elle forme, elle rémunère, elle paye, elle collecte les cotisations sociales, elle aide même le fisc, elle négocie avec les partenaires sociaux, elle a un ancrage territorial, une responsabilité environnementale, sociale et sociétale.
À ce titre, elle adresse donc toutes les parties prenantes : salariés, managers, candidats, direction, partenaires, acteurs de l’emploi, fournisseurs, syndicats, actionnaires, clients.
La marque employeur, c’est la réponse aux trois questions simples,
La réponse simple doit être cohérence, homogène et partagée par tous au sein de votre organisation.
De notre expérience au sein de Parlons RH avec les différents cas d’entreprise que nous avons rencontrés, la réponse à ces trois questions se situe à deux niveaux :
Pour donner la patate à votre marque employeur, reposez-vous sur la Pomme De Terre, PDT : elle doit être Pertinente, Différenciante et Transparente.
Je vais vous faire part d’une rapide anecdote récente avec un DRH d’un groupe de 1 000 salariés qui me demandait combien coûtait une marque employeur… Plutôt que de lui demander de préciser sa question, je lui ai répondu un peu rapidement j’en conviens : « 100 K€ ». Il m’a fait des yeux exorbités, et je ne suis pas sûr qu’après cela j’ai eu beaucoup d’écoute… Bien sûr, il aurait fallu préciser la question : est-ce le diagnostic, l’élaboration de la promesse employeur, des actions sur les réseaux sociaux ou du campus management dont il était question avec mes 100 K€ vite exprimés.
La bonne réponse aurait sans doute été 1 K€ par salarié et par an soit 1 million d’euros d’investissement. Pensez-vous gagner la guerre économique sans gagner la guerre des talents ?
La marque employeur c’est un sujet stratégique, au sens où elle engage le long terme de votre organisation, et même parfois sa pérennité. Il faut positionner le sujet au bon niveau, c’est-à-dire au codir / comex et y allouer les ressources minimum.
Sinon on parle de communication RH, c’est bien la communication RH, c’est même indispensable, mais je ne pense pas qu’on gagne la guerre des talents avec une belle campagne de com’. Ni quand on confie le sujet des réseaux sociaux RH à un stagiaire.
Pour ce qui est de la démarche, elle est simple et se décline en 4 temps. Je vous invite à prendre connaissance de cet article qui décrit la méthodologie à adopter.
Pour conclure sur l’impérieuse nécessité, pour vous employeurs, de vous lancer plus activement encore dans une démarche solide de marque employeur, je dirai qu’avec une démarche de marque employeur vous allez bien sûr améliorer l’attractivité, la fidélisation et l’engagement de vos collaborateurs, mais vous allez surtout :
Du bon sens et du sens, c’est ce qui permet de retrouver une forme d’alignement de l’entreprise, de la cohérence dynamique.
Avec la marque employeur vous n’avez pas uniquement l’opportunité de remettre l’homme au cœur de l’entreprise, mais aussi de remettre l’entreprise au cœur de l’Homme.
Que demander de plus ?
(Re)visionnez cette intervention sur la scène du Grand Palais de Lille :
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Très bon article. Merci