RSE : les dirigeants trop frileux sur les questions sociales ?

La RSE,  responsabilité sociale (ou sociétale) de l’entreprise, est un concept désignant la prise en compte par les entreprises d’enjeux environnementaux, sociaux et éthiques dans l’exercice de leur activité. Si les dirigeants français sont de plus en plus nombreux à s’engager dans une démarche RSE, il semble qu’ils se concentrent surtout sur les questions environnementales et délaissent les aspects sociaux. Une tendance confirmée par un baromètre établi en juillet par Opinion Way.

 

Les patrons français sensibles aux questions de RSE

Bonne nouvelle, si l’on en croit le baromètre réalisé en juillet par Opinion Way pour CCI France, La Tribune et Europe 1 dans le cadre de « La grande consultation » : 61 % des chefs d’entreprise interrogés ont le sentiment d’avoir mis en place une démarche RSE. Les résultats par secteur sont les suivants :

  • Industrie : 70 %
  • Services : 67 %
  • Commerce : 59 %
  • Construction : 26 %

On peut aussi retenir que les dirigeants d’entreprises de 10 salariés ou plus sont 81% à avoir le sentiment de s’engager en faveur de ces pratiques. En outre, 90 % de l’ensemble des répondants jugent que c’est à eux de porter la démarche ! À première vue, donc, les patrons français seraient une large majorité à avoir saisi l’importance des enjeux RSE et à s’engager dans ce domaine. Mais qu’en est-il, concrètement, de cet engagement sur le terrain ?

 

L’environnement, l’arbre qui cache la forêt d’une RSE incomplète

La protection de l’environnement est le premier champ d’action mis en avant par les entrepreneurs français lorsqu’on les questionne sur leur engagement RSE. L’écologie est apparemment une affaire sérieuse pour nos entreprises. À titre d’exemple, 69 % des dirigeants interrogés déclarent avoir engagé une série de dispositions destinées à préserver l’environnement, telles que l’utilisation de gobelet en carton ou l’usage de papier recyclé.

Certes, ces pratiques sont tout à fait positives et estimables, mais elles ont tout de même un caractère « minimaliste ». Imprimer sur du papier recyclé, n’est-ce pas le moins que toute entreprise puisse faire pour lutter contre la déforestation ? C’est d’autant plus vrai que ce papier, qui coûte approximativement 20 % plus cher que du papier classique, devient aujourd’hui beaucoup plus accessible.

Reconnaissons, cependant, que les entreprises sont de plus en plus nombreuses à vouloir aller au-delà des « mesurettes » vis-à-vis de l’environnement. Une nouvelle preuve en a été donnée le 10 juillet dernier, lors d’une cérémonie hébergée par la fondation GoodPlanet de Yann Arthus-Bertrand : les patrons de 65 entreprises de toutes tailles et tous secteurs ont présenté leurs engagements volontaires, afin d’intégrer la protection de la biodiversité dans leurs activités.

Initiée par l’association Epe (Entreprises pour l’environnement), la démarche a été soutenue par des partenariats avec divers réseaux d’entreprises, dont le Medef, ou des ONG environnementales (France nature environnement, le WWF, etc.). Dix engagements ont été souscrits par toutes les sociétés adhérentes, allant de l’intégration de la biodiversité dans la stratégie d’entreprise à la sensibilisation des collaborateurs. Certains acteurs livrent même des échéances, comme BNP Paribas, qui s’engage à éliminer la déforestation de son portefeuille avant 2020, ou le promoteur Icade, qui vise 25 % de ses nouvelles constructions en biodiversité en 2020 également.

En résumé, il semble donc que le volet écologique de la RSE soit sérieusement traité par un nombre croissant d’organisations. Peut-on en dire autant du volet social ?

 

La dimension sociale aux abonnés absents ?

La dimension sociale est évidemment essentielle dans toute démarche de RSE : après tout, il s’agit bien de responsabilité sociale de l’entreprise ! Dans ce domaine, il ressort du baromètre d’Opinion Way que les initiatives en faveur du bien-être au travail, de la diversité dans le recrutement, voire de la lutte contre le harcèlement sexuel, sont encore très limitées. On retiendra ainsi que :

  • 25 % seulement des dirigeants interrogés proposent aux salariés un environnement de travail épanouissant ;
  • 15 % à peine se mobilisent sur des questions de société comme le harcèlement sexuel au travail ou la laïcité ;
  • 8 % (!) ont une politique RH favorisant la diversité et le recrutement de personnes éloignées de l’emploi ;
  • 8 % proposent des produits bio ou locaux à leurs salariés.

A contrario, ils sont respectivement sur ces quatre questions 74 %, 83 %, 89 % et 90 % à déclarer que « ce n’est pas prévu pour le moment ».

Autre enseignement notable du baromètre : interrogés sur la « prise de décision participative », les répondants n’ont été qu’un tiers (33 %) à considérer que tous les salariés doivent être impliqués dans les décisions stratégiques de leur entreprise. Ils sont d’ailleurs encore moins nombreux à le penser (25 %) dans les entreprises de plus de 10 salariés. En d’autres termes, une gouvernance d’entreprise moins pyramidale, plus participative, n’est pas pour demain.

Or la responsabilité sociale de l’entreprise se manifeste aussi dans la volonté de dépasser les schémas d’organisation et de management « à l’ancienne ». La RSE partage avec la QVT – la qualité de vie au travail, qui est d’ailleurs une notion englobée par la RSE – de ne pouvoir se limiter à quelques effets d’annonce à des fins de communication. Voilà peut-être l’une des leçons qui peuvent être tirées du baromètre d’Opinion Way sur le sujet.

 

Dans une décision rendue le 25 mai pour un litige opposant Nantes Métropole à une entreprise dans le cadre d’un marché d’impression, le Conseil d’État a rejeté l’utilisation des critères RSE dans les marchés publics. Ainsi, alors que les critères environnementaux ou les conditions de travail du personnel impliqué dans un marché public peuvent être considérés dans certains cas, les hauts fonctionnaires ont estimé que la RSE n’était pas suffisamment liée au marché concerné. Cette décision appuie l’idée que, si la RSE progresse dans les entreprises françaises, elle reste très largement fondée sur le volontariat des dirigeants pour sa mise en place. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles elle ne s’incarne de façon nette que sur le plan environnemental et écologique.

 

Jean sait dimensionner une prise de parole RH ou corporate grâce à des contenus à forte valeur ajoutée éditoriale ou créative. Il met à profit son expertise, acquise dans les meilleures agences de communication RH, B2B et dans la publicité, dans l’élaboration de tribunes, newsletters et messages impactants. Diplômé en langues, Jean est aussi doté d’un Master en communication.

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