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Soft skills de l’intelligence collective : ce que Codir et équipes opérationnelles peuvent apprendre les unes des autres

Pour améliorer l’intelligence collective au sein d’une équipe, il est nécessaire de se pencher sur les soft skills mobilisées par cette dernière. Sur un panel de plus de 170 équipes, que nous avons accompagnées, nous avons cherché à identifier la façon dont les Codir et les équipes opérationnelles managent leurs interactions. Peut-on repérer des différences fondamentales, porteuses d’enseignements précieux ?

La performance d’une équipe dépend étroitement de la capacité des individus à interagir, c’est-à-dire à collaborer, à communiquer et à se coordonner. Il est dès lors intéressant d’étudier le processus à l’œuvre au sein de l’équipe, en matière d’organisation du travail, de partage de connaissances et de prises de décision, afin de l’optimiser ensuite. Ce processus n’est autre que l’intelligence collective, que l’on peut définir comme « la capacité d’un collectif à atteindre son plein potentiel en manageant lui-même ses interactions ».

Pourquoi s’intéresser à l’intelligence collective ? Celle-ci n’est, certes, pas une fin en soi. Viser son développement dans les équipes permet toutefois d’en améliorer le fonctionnement, de favoriser le bien-être au travail, la confiance, la collaboration, et l’envie de se challenger mutuellement. La faciliter permet aussi de développer un esprit de solidarité et un sentiment d’appartenance ; à une époque où, avec la généralisation du télétravail, les collaborateurs sont en attente de davantage de lien social. Finalement, l’équipe qui développe son intelligence collective est plus efficiente et produit de meilleurs résultats, qu’ils soient chiffrables ou humains.

Codir, équipes opérationnelles : les soft skills de l’intelligence collective dépendent de l’activité

L’objectif de notre recherche sur le travail collaboratif au sein des Codir / Comex et des équipes opérationnelles était de déterminer si ces deux groupes distincts parviennent, ou non, différemment à l’intelligence collective. Retrouve-t-on en leur sein le même type de compétences comportementales ? S’il y a des différences, quelles sont donc les soft skills à développer, selon la nature de l’équipe en question ?

L’analyse des soft skills les plus présentes au sein des Codir, montre que 2 soft skills se distinguent particulièrement en matière d’intelligence collective, par rapport à celles mobilisées par les équipes opérationnelles :

  • l’assertivité, ou la capacité à affirmer son point de vue dans le respect de l’autre. Il s’agit notamment de savoir exprimer son désaccord pendant une réunion, même si la majorité est d’accord ;
  • La persévérance, ou la capacité à avoir une vision à long terme et à essayer de la maintenir en gardant le cap.

Au sein des équipes opérationnelles, l’analyse montre que 3 autres soft skills sont davantage développées :

  • l’écoute et la prise en compte du point de vue de l’autre ;
  • la capacité à faire confiance et à cultiver un esprit collaboratif ;
  • l’engagement collectif, ou la capacité des membres de l’équipe à s’engager les uns envers les autres, dans un esprit d’entraide.

Comment expliquer ces différences ? L’hypothèse la plus probable est que les contraintes et les activités qui pèsent sur ces différents collectifs ne sont pas les mêmes. On observe ainsi une adéquation entre les soft skills mobilisées et la nature des tâches que les équipes ont à réaliser. Au sein des Codir, la prise de décision est un enjeu fondamental. Cela nécessite de regrouper toutes les informations disponibles, d’envisager plusieurs solutions, de challenger les propositions de chacun, d’adopter une vision à long terme, puis de tenir son point de vue, en faisant preuve de persévérance et d’assertivité. 

Du côté des équipes opérationnelles, les enjeux de production ne sont pas du même ordre. Les activités individuelles nécessitent d’être articulées et  coordonnées en permanence à travers la collaboration, et/ou la coopération. Dans ce cadre, l’intelligence collective se développe ainsi sur la base de l’écoute, des enjeux de confiance construits entre les personnes, et de l’engagement collectif.

De la nécessité de prendre de la hauteur

Sur la base de ces constatations, il est possible d’affirmer que les entreprises, les RH et les managers qui s’engagent dans le développement de l’intelligence collective auprès de leurs équipes et au travers d’interventions de consultants ou de coachs (« team training », « team coaching » et « team building ») devraient exiger des intervenants :

  • de faire un état des lieux des soft skills présentes dans l’équipe concernée ;
  • d’observer en quoi ces soft skills sont en adéquation avec l’activité phare de cette équipe ;
  • d’inviter les managers et l’équipe à prendre de la hauteur sur leur mode de fonctionnement ;
  • de dresser un plan d’action destiné à « entraîner » et développer les soft skills identifiées au départ.

Pas question d’imaginer un long plan de bataille tenant sur 70 slides : pour agir sur la capacité d’une équipe à mieux manager ses interactions, mieux vaut prendre de la hauteur, puis isoler plusieurs micro-actions concrètes, afin de réaliser des micro-transformations réellement efficaces. Il peut par exemple s’agir :

  • pour un manager, de questionner systématiquement les membres de son équipe avant une prise de décision, ou en réunion, solliciter l’expression des points de vue ;
  • pour un Codir, de prévoir un temps dédié au « challenge de la décision » sur des bases d’écoute et de collaboration;
  • pour une équipe opérationnelle où l’esprit collaboratif est insuffisant, de mettre en place des temps récurrents visant l’amélioration des façons collectives de travailler.

Les Codir et les équipes opérationnelles gagneraient-elles, finalement, à s’inspirer de ce que fait l’autre ? Il est en effet possible de faire l’hypothèse selon laquelle les équipes opérationnelles ont beaucoup à apprendre des Codir par rapport à la prise de décision, tout comme les Codir ont beaucoup à apprendre des équipes opérationnelles sur le plan de la collaboration.

Pour fonctionner, le développement de l’intelligence collective ne doit donc pas être une fin en soi, mais être relié aux enjeux spécifiques du travail de l’équipe concernée. Les soft skills qui se manifestent selon le collectif concerné peuvent ensuite être « entraînées », développées au service d’enjeux productifs. Cet entraînement passera nécessairement par une prise de recul, par la mise en place de micro-actions, et enfin par un suivi sur le long terme du plan global mis en place.

Crédit photo : Shutterstock / Friends Stock

Docteur en sciences et techniques des activités sportives, et Responsable des programmes R&D au sein de PerformanSe, Arnaud Trenvouez est un spécialiste des questions de performance collective.

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