Cahier de tendances 2023

« Il faut remettre le plaisir au cœur de la formation » (Yasser Retayli, Goodhabitz France)

Le marché de la formation affronte un défi titanesque : fournir davantage, plus vite, à un haut niveau de qualité, pour des ressources qui n’augmentent pas. Le digital et l’innovation pédagogique sont les seules réponses possibles, pour Yasser Retayli, Directeur de GoodHabitz France.

La notion de compétences a-t-elle changé de portée et de signification au cours des 20 dernières années ?

Ce qui a changé au cours des 20 dernières années, c’est surtout l’émergence de la notion d’employabilité et d’autonomisation vis-à-vis du développement des compétences. L’avènement du compte personnel de formation (CPF) est emblématique de cette évolution : le système de formation s’adresse de plus en plus directement au collaborateur, désormais invité à prendre en main sa formation tout au long de sa vie.

L’employabilité n’est plus uniquement à la charge de l’employeur. Les organismes de formation se tournent de plus en plus vers les collaborateurs, qui sont incités à réfléchir par eux-mêmes aux compétences dont ils auront besoin demain, dans leur emploi actuel ou dans la suite de leur carrière.

Les soft skills sont-ils une mode ou une vraie révolution dans la façon de percevoir la formation et les compétences ?

Les soft skills correspondent à une vraie tendance de fond. Certaines sont connues depuis longtemps, d’autres émergent, et tous les employeurs n’ont pas encore pris la mesure de leur importance. Mais elles gagnent en importance dans le portefeuille des compétences des collaborateurs dans un contexte de compétitivité accrue et d’économie de la connaissance. Les collaborateurs et les managers doivent être en mesure de mettre à jour leurs compétences techniques et de s’adapter au changement permanent.

Les soft skills sont par ailleurs un facteur différenciant de plus en plus pertinent en matière de recrutement, les candidats étant de plus en plus diplômés. Les soft skills sont donc un besoin pour les entreprises comme pour les collaborateurs en quête de développement personnel et plus largement de développement des compétences, comme apprendre à gérer leurs délais, à communiquer, à réduire leur niveau de stress. Ils attendent des employeurs qu’ils les aident à devenir une meilleure version d’eux-mêmes.

Y a-t-il de vrais progrès pédagogiques dans la façon dont sont enseignées/évaluées les soft skills aujourd’hui ?

Oui, tout à fait. La première difficulté est l’identification et l’évaluation des soft skills maîtrisées par les collaborateurs. Ceux-ci ont besoin de savoir où ils en sont et quelles sont leurs lacunes. Pendant longtemps, on s’est reposé sur l’évaluation par les pairs. Aujourd’hui émergent des plateformes et des outils d’autoévaluation de plus en plus performants.

La recherche en intelligence artificielle et en sciences cognitives a permis également une forte diversification des pédagogies et des formats d’apprentissage des soft skills, de l’autoformation au présentiel, au-delà des mises en situation et des jeux de rôles qui prévalaient antérieurement.

En quoi l’offre de GoodHabitz répond-elle à ces différents enjeux ?

Les entreprises ont tendance à dépenser 95 % de leur budget pour former 5 % de leurs collaborateurs, souvent le top management. Les autres collaborateurs ont un accès réduit à la formation. La conviction de GoodHabitz, c’est qu’il est essentiel que tout le monde puisse se former en continu et se développer personnellement à tous les niveaux. L’idée est de capter les 5 % de budget restant pour former l’ensemble des collaborateurs à des compétences transverses, par le biais d’une plateforme.

Dans un premier temps, un outil d’autoévaluation leur permet d’identifier leurs préférences en matière de méthodes d’apprentissage, leurs qualités et leurs points faibles, les compétences sur lesquelles ils doivent travailler pour s’améliorer, afin de déterminer les formations qui leur conviennent le mieux parmi celles proposées sur la plateforme. Pour développer ces dernières, nous nous appuyons sur l’innovation pédagogique. Nos formations sont dispensées sous 25 formats différents – du magazine au documentaire en passant par le témoignage, le quiz, l’exercice en ligne… Les collaborateurs choisissent les formules qui leur conviennent le mieux.

Un troisième levier d’intervention est l’accompagnement des organisations à la mise en place d’une culture de l’apprentissage. Nous proposons l’élaboration d’un plan d’action spécifique à trois niveaux, collaborateurs, équipe, entreprise. Il s’agit de promouvoir le développement des compétences auprès des employés, par l’intermédiaire d’une plateforme interne de marketing de la formation. L’objectif est d’aider les collaborateurs à prendre la décision de se former tout au long de leur vie, à être les acteurs de leur propre développement personnel. Il faut donner l’envie de se former.

En quoi la technologie peut-elle aider à individualiser les parcours, dans les contenus comme dans les modalités ?

De façon générale, l’automatisation des process permet aux formateurs et aux responsables formation de gagner du temps et de se concentrer sur les interactions avec les apprenants et sur l’ingénierie pédagogique. Mais il y a également un nouvel axe de développement lié à l’intelligence artificielle. Nous avons conçu un robot conversationnel capable d’accompagner l’apprenant dans sa formation, de personnaliser l’expérience, tout en s’assurant qu’il ne soit pas seul devant sa formation. En répondant à ses questions, le robot maintient le niveau d’engagement et de motivation. Il peut ensuite l’interroger à la fin de la session pour faire le point sur ce qui a été appris.

Nous considérons cette innovation comme un 26e format pédagogique, transversal aux autres. Dans la continuité de stratégie de GoodHabitz depuis ses débuts, l’idée est de garantir que la formation en ligne soit intéressante, engageante, fun. Le problème de la solitude de l’apprenant en ligne est vieux comme le e-learning, et nos formats pédagogiques visent à y apporter une solution. Notre robot conversationnel vient ajouter, en plus, un soutien pédagogique toujours disponible.

Quels sont les prochains défis pédagogiques qui attendent les formateurs et les entreprises ?

Je vois trois défis majeurs qui vont bouleverser la manière dont les formateurs travaillent. Le premier est celui de l’évolution accélérée des métiers et des compétences. Il faudra savoir adapter de plus en plus rapidement les contenus et les dispositifs à la réalité mouvante.

Le deuxième est celui de l’ingénierie pédagogique. Avec l’explosion de la formation en ligne, le rôle des formateurs se transforme. Au rôle de pédagogue s’ajoute, voire parfois se substitue en partie, celui de facilitateur d’apprentissage, d’accompagnement des apprenants à la recherche des bonnes ressources. Le but est que chaque utilisateur vive une expérience de formation très personnalisée la plus impactante possible d’un point de vue métier.

Le troisième défi, enfin, est celui de l’intégration des outils digitaux de formation et de gestion des process internes. Face à la complexité des enjeux, l’entreprise est obligée de recourir à des solutions élaborées ainsi qu’à des partenaires innovants. L’articulation de l’ensemble doit être soigneusement pensée en amont. Dans l’immédiat, une tendance doit être prolongée : celle de l’amélioration de l’expérience utilisateur dans la formation en ligne.

On le sait, la crise sanitaire a accéléré l’adoption du e-learning par les entreprises et les collaborateurs. Et elle a, dans le même temps, poussé les acteurs de la formation à s’intéresser de près à la qualité de l’expérience vécue par les apprenants à distance. Je crois pour ma part qu’il est nécessaire d’intégrer un storytelling engageant pour inciter les collaborateurs à se former en continu. Il faut remettre le plaisir au cœur de la formation !

Retrouvez cet article et bien plus encore dans notre Cahier de tendances RH ! À travers des portraits de DRH, des interviews d’experts ou encore des chiffres-clés, nous décryptons pour vous les 10 tendances RH qui rythmeront l’année 2023. Un grand merci à nos partenaires Lucca, Cornerstone, GoodHabitz, Afnor, Golden Bees, United Heroes, Universum, Actinuum, Swile, LinkedIn Talent Solutions sans qui ce cahier n’aurait pu voir le jour.

> Retrouvez aussi notre dossier complet, alimenté régulièrement. Il regroupera à terme tous les articles du Cahier de tendances.

Passionnée par la création de contenu et le marketing digital, Manon est Content Manager chez Parlons RH. Avant de rejoindre l’agence, elle a exercé en tant que rédactrice-correctrice, puis elle a côtoyé l’univers des start-up. Ses domaines de prédilection RH tournent autour de l’expérience collaborateur et de la formation, en particulier du digital learning. Manon est titulaire d’une licence en communication et relations presse et d’un master en content marketing.

Les derniers articles

[WEBINAR] Et si vous exploitiez enfin les entretiens annuels ?

Dominique Bernet, Directeur Commercial de SERVICES RH ONLINE, sera l'invité de Parlons RH, pour ce…

18 avril 2024

« L’optimisation de la GTA contribue à améliorer l’expérience collaborateur » (Cécile Bardollet, directrice des opérations GTA d’ADP)

Pour Cécile Bardollet, la GTA, comme outil, va au-delà de sa fonction réglementaire, devenant un…

17 avril 2024

Les grands chiffres de l’onboarding

Dans le paysage professionnel actuel, un programme d’onboarding de qualité est plus qu’un luxe, c’est…

16 avril 2024

Revue du web #488 : emploi des seniors, engagement et management

Cette semaine, l’emploi des seniors est à la une de la revue de web, après…

12 avril 2024

GTA : « Des outils aussi simples d’utilisation que technologiquement complexes » (Sidney Hanon, Product Manager chez Horoquartz)

Pour Sidney Hanon, Product Manager chez Horoquartz, l'expérience utilisateur est au coeur des développement des…

10 avril 2024

Compétences managériales : la grande prise de conscience des entreprises

La gestion des talents et des compétences managériales est plus qu'une tendance passagère, c'est un…

9 avril 2024