Comment créer son baromètre RH : les 7 cases à cocher

C’est décidé, vous réalisez un baromètre RH sur un sujet de votre domaine d’expertise. Vous allez rejoindre le cercle de ceux qui produisent du contenu chiffré sur Internet, et contribuent à éclairer la lanterne des autres acteurs de la sphère RH. Dans l’idéal, vous allez associer votre marque à un rendez-vous statistique annuel, qui permette à vos partenaires, clients et, oui, concurrents d’y voir plus clair sur leur environnement métier. Mais comment vous y prendre ? Quelles sont les étapes à suivre ? Les embûches à éviter ? Proposition de réponse en 7 points.

 

1.     Créer un baromètre, oui, mais sur quoi ?

Un baromètre désigne une enquête destinée à se renouveler périodiquement. On crée ainsi un événement, un rendez-vous. Le thème du baromètre doit être choisi en conséquence : il doit concerner des données dont l’évolution, ou l’absence d’évolution, présente un intérêt pour le lecteur. Par exemple, quel est l’impact de telle évolution législative, ou de telle innovation technique, sur la pratique d’un métier donné ?

Vous choisirez donc un thème proche de votre métier, non traité par ailleurs (ou sous un angle différent), propice à susciter des questions que se posent vos clients. L’originalité du thème ou de l’angle choisi est essentielle : commencez par benchmarker les baromètres et enquêtes existants pour être certains de ne pas refaire ce qui a été fait. Un bon thème est un thème sur lequel il vous est arrivé plusieurs fois, au cours de vos lectures, de vous demander « mais oui au fait, qu’en est-il de ce sujet ? Tout le monde en parle et donne son opinion mais en réalité on n’a pas de « vrais » chiffres ». En trouvant l’un de ces « angles morts », vous optimisez vos chances de voir votre baromètre repris par les blogs et les médias spécialisés, toujours en recherche de contenus frais – et à chaque fois, c’est votre marque qui fait le buzz !

Le thème doit avoir un lien avec votre métier, mais lequel ?

– Il peut s’agir d’un aspect particulier de votre expertise : par exemple, si vous êtes éditeur d’une solution de gestion des temps, une enquête sur la pratique du télétravail ou sur le recours aux heures supplémentaires… Traiter à fond un sujet très spécialisé vous positionne comme expert et permet de produire une étude qui fasse rapidement référence sur le sujet donné.

– Au contraire, vous pouvez adopter une perspective plus large : notre éditeur de solution de gestion des temps pourra ainsi aborder le rapport des salariés à leur lieu de travail, et intégrer des questions sur le temps de travail. Dans tous les cas, il s’agit de replacer votre expertise dans un scénario du présent et de l’avenir dans lequel elle s’impose comme une réponse performante.

Choisissez surtout un sujet qui vous intéresse : vous en tirerez des enseignements pour vous-même, et vous n’en serez que plus convainquant dans la conception de l’enquête !
 

 

2.     En utilisant quel fichier ?

Avant même de se pencher sur le questionnaire lui-même, il faut se poser la question du fichier des personnes à sonder. A vrai dire, nous séparons artificiellement le point 1 et le point 2, mais en réalité ils sont indissociables : la thématique choisie est forcément liée à la nature de la population interrogée. Le baromètre peut mesurer les tendances chez les responsables RH, les prestataires RH, les salariés, les candidats… Ce ne seront ni le même angle, ni les mêmes questions !

La première chose à faire est donc de circonscrire le périmètre de la population à consulter. La nécessité va souvent réduire le champ des possibles, voire dicter la réponse : en ces temps de RGPD, un fichier ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval ! Il peut s’agir :

  • d’un fichier « maison » : fichier clients, partenaires, prospects, abonnés à la newsletter… Attention cependant : le fichier doit avoir été constitué dans les règles de l’art, qui depuis l’entrée en vigueur du RGPD le 25 mai 2018 se sont précisées et renforcées. Notons cependant que les exigences en matière d’emailing B2B sont moins élevées qu’en B2C. Dans tous les cas, les personnes doivent être informées de l’utilisation de leurs données et pouvoir se désinscrire à tout moment. C’est une obligation légale et un impératif commercial évident !
  • d’un fichier acheté ou « loué » auprès d’un prestataire. A noter que le coût de ces fichiers est élevé (entre 0,55€ et 1€ le contact en B2B, environ), et leur qualité peut s’avérer très inégale. Il faut veiller à ce que la base soit correctement ciblée : difficile d’en juger a priori, vous n’aurez accès qu’aux contacts des répondants lors d’une location de fichier.

Combien de contacts faut-il cibler ? Tout dépend de la qualité du fichier, de son degré de « qualification ». Et celle-ci, à son tour, dépend de la nature de la cible.

Si vous sondez la population des candidats en recherche de poste, qu’ils soient en emploi ou non, vous pouvez « arroser » large : les personnes susceptibles de répondre sont nombreuses, et il vous faudra pour générer une enquête crédible obtenir plusieurs centaines de réponses, voire dans l’idéal dépasser le millier. Et donc utiliser des fichiers très importants.

Si en revanche vous vous intéressez à des fonctions plus précises – comme les responsables formation, les DRH de PME, les responsables paie… Vous pourrez justifier d’un nombre de réponses plus réduit – 200 ou moins – mais vous aurez besoin d’un fichier très qualifié pour y parvenir.

On parle souvent d’un taux de retour de 10 à 20% pour les enquêtes en ligne en B2B, mais ce chiffre n’a qu’une valeur de repère.

3.     Comment construire son questionnaire ?

Nous sommes partis implicitement sur le modèle d’une enquête réalisée en ligne, via un questionnaire. C’est aujourd’hui la modalité la plus fréquente et la plus accessible pour un acteur RH. Bien sûr, il est toujours possible de compléter l’analyse par des entretiens qualitatifs avec un échantillon de professionnels.

Pour élaborer son questionnaire, on respectera quelques principes :

– Limiter le nombre de questions : entre 12 et 20 entrées, pour disposer d’un nombre suffisant de données, tout en optimisant ses chances d’attirer les répondants. Le but est de faire mentir le moins possible la mention « prenez trois minutes pour répondre à notre sondage » ! Sérieusement, il est préférable de tester soi-même le questionnaire en le chronométrant pour être au plus près de la réalité.

– Veiller à ce que l’intitulé des questions soit simple à comprendre, en évitant le jargon. Il est indispensable de tester les questions sur quelques lecteurs issus de la même catégorie que celle que l’on cible.

– Les questions à réponse unique (« avez-vous recours au e-learning pour vos salariés ? » ou « parmi les affirmations suivantes, laquelle correspond le mieux à votre conception de la marque employeur ? ») sont plus faciles à traiter et à comprendre : il n’est pas déraisonnable de veiller à ce qu’elles représentent la plupart des entrées, surtout pour une première enquête. Mais les questions pour lesquelles plusieurs choix sont possibles (« quels sont les 3 services les plus impactés dans votre entreprise par l’entrée en vigueur du RGPD ? ») donnent souvent des résultats très parlants, même s’ils sont plus délicats à processer et à expliquer.

– Inclure en fin de questionnaire le nom, le prénom, le mail, la fonction/situation, éventuellement le nom de l’entreprise ; la taille, le secteur, voire l’adresse de l’entreprise, pour pouvoir segmenter l’échantillon.

Au total, le questionnaire doit raconter une histoire, et montrer au répondant qu’il a affaire à un acteur bien en phase avec les préoccupations de son marché, et souvent en avance – en posant des questions auxquelles on n’aurait pas forcément pensé, mais qui font se dire « ah oui, tiens, j’aimerais bien savoir ça… » Le questionnaire lui-même, avant même son analyse, véhicule votre expertise.

 

4.     Et envoyez la sauce !

Vient alors le grand jour : celui du premier envoi. Quelques passages obligés :

  • Soignez vos rédactionnels ! Le titre de l’étude, les trois lignes de présentation sur le questionnaire même, mais aussi le texte des mailings. Il faut donner envie de participer, associer le répondant à l’aventure, lui assurer l’exclusivité des résultats, instiller l’idée que répondre est à la fois dans son intérêt et dans celui de la collectivité.
  • Faites suivre par tous les canaux disponibles : sur les réseaux sociaux bien sûr, par mail à des contacts ciblés, dans la signature de vos messages, en pop-up sur votre site, sur votre page « actu », via un article sur votre blog si vous en avez un…
  • Prévoyez bien deux ou trois relances pour vos mailings.
  • Il faut fixer dès le départ une date de fin de recueil des réponses, que l’on pourra éventuellement repousser d’une semaine ou deux, mais il faut savoir terminer une enquête !
  • Assurez quotidiennement le suivi des réponses, en tenant un tableau du nombre de questionnaires remplis par jour et par source (LinkedIn, Twitter, article de blog, mailing…). Pour faciliter ce suivi, on pourra dupliquer les questionnaires et les partager via des URL différentes dans les mailings, les tweets, les posts linkedIn… Ça ne change pas le résultat mais ça permet d’en savoir davantage sur l’efficacité des différents canaux de communication.

La phase de recueil des questionnaires est décisive : c’est elle qui permettra de conférer de la crédibilité à l’étude, en générant un nombre suffisant de réponses.

 

5.     Traiter les données

A présent, tout est dans la boîte : le moment est venu de tirer des données recueillies les analyses les plus pertinentes. Naturellement, plus votre échantillon est important, plus vous serez en mesure d’effectuer des recoupements et des distinctions entre différentes catégories de répondants.

Première étape : choisir l’outil. Il en existe tant aujourd’hui, en ligne ou non, que nous ne nous risquerons pas ici à en proposer un inventaire ni même une sélection. Certaines intègrent tout le processus depuis le formulaire en ligne. Pour plus de liberté, on peut aussi opter pour un simple GoogleForm, et récupérer les données en un fichier .csv ou .xlsx.

Pour des traitements simples – ceux qui impliquent des questions à réponse unique, seules ou croisées – Excel peut s’avérer très suffisant. Les choses se compliquent si l’on veut aller plus loin, comme croiser des questions à réponses multiples ou générer des graphiques mieux personnalisés. A chacun de se faire son expérience et d’adopter l’outil le mieux adapté à ses attentes.

Pour ce qui est du traitement lui-même, on peut vite se retrouver submergé par l’abondance des combinaisons possibles. Une méthode possible est la suivante :

– Commencer par traiter chaque question séparément, sous la forme d’un camembert ou d’un graphique en barres.

– Pour chaque question (lorsque c’est pertinent), croiser avec les principaux segments de votre échantillon (taille d’entreprise, secteur, métier…).

– A partir de ce premier dépouillement, posez-vous la question : quelle histoire souhaitons-nous raconter ? Quels aspects de la thématique voulons-nous mettre en valeur, éclairer, analyser ? Avec toujours les deux mêmes critères en tête : apporter du « nouveau et intéressant », et valoriser votre expertise.

Cette problématique, une fois définie, vous amènera naturellement à interroger votre base en faisant des croisements – quelle part des salariés de grandes entreprises qui a répondu « A » à la question 12 a répondu B à la question 13 ? etc. Vous construisez ainsi un récit autour d’une série de résultats significatifs. Votre expertise joue un rôle dans ce récit, mais n’occupe pas toute la place. Par exemple, si vous vendez des solutions de recrutement prédictif, l’étude doit présenter différents aspects et tendances du marché de l’emploi aujourd’hui, l’évolution des besoins des entreprises, des attentes des candidats… L’utilisation des solutions de recrutement prédictif ne fera l’objet que d’une ou deux questions, en lien avec l’apport de ces solutions aux problématiques plus générales qui sont soulevées.

 

6. Produire les livrables

Quand vous produisez un baromètre, vous êtes votre propre client. La prestation que vous vous rendez doit se traduire par des livrables, qui serviront de supports à la diffusion de l’étude.

Ces livrables peuvent comprendre :

– L’étude proprement dite. Une fois définie votre démonstration, il reste à la mettre en mots, au fil d’un document qui peut faire de 8 à 20 pages, par exemple, en fonction de la mise en page et de l’abondance des résultats. Le document est illustré de graphiques et présente les données de façon claire et pédagogique. Bien sûr, la présentation peut varier en fonction de l’identité de votre entreprise. On évitera cependant une présentation trop « ludique » : l’étude est le document de référence, elle doit « faire sérieux ». Le format électronique (en général .pdf) est à privilégier, même si quelques impressions de prestige peuvent contribuer à la communication.

– La synthèse : les trois ou quatre principaux messages sur deux, trois ou quatre pages, avec une sélection de graphiques. Associée à un communiqué de presse, elle permet une exploitation rapide des résultats du baromètre par les médias intéressés.

– Une infographie peut compléter avantageusement le dispositif. En 4, 5 ou 6 blocs de graphiques et chiffres (pas forcément exactement les mêmes que ceux de la synthèse), l’infographie donne les résultats les plus significatifs de l’étude de façon visuelle et dynamique. Médias et blogs sont friands de ces productions.

– Les résultats peuvent également être mis en scène en une vidéo ou une animation.

 

7. Marketer les livrables

Reste ensuite à diffuser aussi largement que possible les livrables dérivés du baromètre. Toutes les combinaisons sont possibles, mais il est important de privilégier deux populations : les journalistes et les participants à l’étude. Des mailings ciblés doivent leur être réservés.

Si vous avez un fichier clients ou newsletter, vous enverrez dans un second temps un mailing sur ces cibles plus larges. Les non-participants verront ainsi que le projet de baromètre a abouti.

On mobilisera pour promouvoir ce contenu les mêmes moyens que pour le questionnaire : pop-up, actu sur le site, article sur le blog si vous en avez un, promotion sur les réseaux sociaux…

Eventuellement, un événement peut être organisé autour de la sortie du baromètre – petit déjeuner, conférence de presse, ou autre rendez-vous moins conventionnel. De préférence, on associera la sortie du baromètre à d’autres actualités, comme un anniversaire ou le lancement d’une nouvelle offre. L’important est de ménager un certain suspense autour de la diffusion des chiffres.

Sur tous les livrables, le nom, l’identité, les coordonnées et la présentation de votre entreprise doivent figurer en bonne place. Ils sont, ne l’oubliez pas, des outils de marketing prestigieux.

 

Et après ?

Voilà, il est là, tout beau, tout propre, votre baromètre ! Il a été diffusé aussi largement que possible dans la sphère RH. Qu’en faire à présent ? A ce stade, votre premier objectif a déjà été atteint : votre marque a fait l’objet d’une communication abondante, associée à un contenu à forte valeur ajoutée sur un champ incluant votre expertise. Il y a fort à parier que vous avez déjà fait quelques belles rencontres qui sont peut-être déjà sur le point de se traduire en contrats. Pour autant, réaliser un baromètre s’inscrit dans une stratégie d’influence de long terme, et il serait erroné de chercher à en évaluer le ROI sur la seule base des contacts générés dans les semaines et mois qui suivent.

Il vous reste à présent à renouveler l’exercice l’année prochaine, seul ou en partenariat avec d’autres acteurs. Une enquête est un projet gratifiant et profitable sur le long terme, mais c’est un investissement non négligeable en temps de travail !

 

Bertrand écrit depuis 1999 pour les entreprises et les institutions, sur les grands enjeux socio-économiques, les RH et la protection sociale. Auprès d’un organisme interprofessionnel nordiste, en freelance après 2010, puis au sein de Parlons RH, il s’attache à rendre accessibles des problématiques complexes sous tout format, du livre d’histoire au billet de blog. Bertrand est diplômé de l’IEP Paris et titulaire d’un Master II en histoire économique contemporaine.

Voir les commentaires

  • et l interactivité du questionnaire ? la possibilité de renvoyer en temps réel un feedback à chaque participant ?

    • Bonjour Pablo, merci pour votre commentaire. A mon sens, l'interactivité en temps réel du questionnaire est certainement une fonctionnalité très intéressante dans le cadre d'une étude de marché, ou d'une enquête de satisfaction ; mais dans un baromètre, censé produire des résultats statistiques en compilant des données anonymes, je ne vois pas bien comment l'introduire ?

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